« Grandeur et misère de la propagande occidentale, Minsk 2, regards et stratégies
« Grandeur et misère de la propagande occidentale, Minsk 2, regards et stratégies
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« Grandeur et misère de la propagande occidentale Le 22/02/2015. Minsk 2, regards et stratégies FIGAROVOX/ANALYSE - Pour Alexis Feertchak, les accords de Minsk signés le 12 février dernier offrent des perspectives de sortie de crise. Le rapprochement entre l'Ukraine et l'Europe se fera avec la Russie, et non contre celle-ci. Alexis Feertchak est fondateur du site Internet et de l'application iPhilo.
Le sang coule encore, les souffrances continuent. L'auteur de cette phrase est un homme qui a éclaté de rire lorsqu'on lui a parlé de trafic d'organes au Kosovo. Le journal Le Monde, quotidien de référence pour nombre de lectrices et de lecteurs, lui a offert une tribune pour y livrer son analyse de la situation en Ukraine au lendemain des accords de Minsk, signés le 12 février dernier. On y lit, bien sûr, les poncifs habituels sur Vladimir Poutine mais surtout le mensonge relatif à la guerre que la Géorgie avait déclenchée contre la Russie en 2008. L'Ancien Ministre français des Affaires Etrangères parvient à en inverser les responsabilités alors que le rapport rendu par Heidi Tagliavini avait formellement mis en cause la Géorgie. Cependant, ladite analyse du French Doctor a été citée par Alexis Feertchak dans un article publié par Le Figaro. Le propos tenu y est riche d'informations, entre autre, sur le rôle joué en coulisses par Jean-Pierre Chevènement dans le cadre des accords de Minsk 2. Cela dit, alors que toutes sortes d'idées fixes relatives au Président de la Fédération de Russie y sont balayées, on y lit malgré tout l'obsession à le viser. D'aucuns s'interrogent sur la différence entre le premier accord de Minsk datant de septembre 2014 et le second accord signé le 12 février 2015 dans la capitale biélorusse. Les mêmes causes vont-elles produire les mêmes effets et conduire ainsi à un nouvel enlisement voire une escalade du conflit militaire dans le Donbass? L'abandon par l'armée ukrainienne de la ville stratégique de Debaltsevo, qui était complètement encerclée, est un coup symbolique très dur pour les forces de Kiev. Bien que de moindre intensité sur l'ensemble du front, les combats continuent dans l'Est ukrainien, notamment dans le chaudron de Debaltsevo, ainsi qu'aux abords du port de Marioupol. L'abandon par l'armée ukrainienne de la ville stratégique de Debaltsevo, qui était complètement encerclée, est un coup symbolique très dur pour les forces de Kiev. À Shirokino, un village près de Marioupol, les milices nationalistes ukrainiennes (bataillons Azov et Donbass), dont les leaders ont annoncé qu'ils refusaient le cessez-le-feu, ont tenté une offensive contre les séparatistes, mais visiblement sans succès malgré le soutien de l'artillerie de l'armée régulière. Une forme de scepticisme plane donc légitimement autour de l'application du cessez-le-feu. Avec ces accords, on lit, par exemple sous la plume de Bernard Kouchner, que Vladimir Poutine aurait gagné du temps et sortirait vainqueur, au moins à court terme, de ces négociations quadripartites avec Petro Porochenko, Angela Merkel et François Hollande. On pourrait penser à première vue que la chute de Debaltsevo lui donne raison. Il est pourtant possible d'être plus optimiste et de voir dans «Minsk 2» une avancée sur le plan politique par rapport à «Minsk 1». En effet, si une solution existe pour mettre fin au conflit ukrainien, elle ne pourra être que politique. Seul cet espoir pourra venir à bout du scepticisme naturel concernant l'application stricte du cessez-le-feu. Si une solution existe pour mettre fin au conflit ukrainien, elle ne pourra être que politique. Une phrase de l'accord est passée largement inaperçue dans les médias, elle est pourtant essentielle dans l'optique d'une sortie de crise: «les dirigeants restent attachés à la perspective d'un espace humanitaire et économique commun de l'Atlantique au Pacifique fondé sur le plein respect du droit international et des principes de l'OSCE». Il y a quelques semaines encore, qui aurait cru que les accords de Minsk pussent être l'occasion de coucher sur le papier le projet gaullien puis mitterrandien d'une grande Europe qui tende la main à la Russie? Cette initiative bienheureuse est le fruit d'un couple franco-allemand renforcé. Il semblerait que Jean-Pierre Chevènement ait aussi joué un rôle discret: invité du Club de la Presse d'Europe 1, l'ancien Ministre de François Mitterrand a révélé avoir rencontré Vladimir Poutine à Moscou dès mai 2014, à la demande du Président Hollande. Conscient des dangers d'une confrontation entre l'Occident et la Russie, Jean-Pierre Chevènement n'a pas seulement éclairé le débat public, mais a aussi participé en sous-main au maintien d'un dialogue constructif avec Moscou. Le concept d'«espace humanitaire et économique commun de l'Atlantique au Pacifique» laisse donc supposer que le rapprochement entre l'Ukraine et l'Europe ne pourra se faire contre la Russie, mais seulement avec elle. En filigrane, l'accord de Minsk, en inscrivant en toutes lettres la «perspective d'un espace humanitaire et économique commun de l'Atlantique au Pacifique», admet la faute originelle de l'Union européenne dans sa gestion du projet de libre-échange avec l'Ukraine. Celui-ci ne pouvait être réalisé sans discussion avec la Russie, dont les liens avec l'Ukraine sont économiques, mais plus encore historiques. Jean-Pierre Chevènement, toujours au micro d'Europe 1, confessait ainsi que l'ancien Président de la Commission européenne José Manuel Barroso avait prié Vladimir Poutine d' «aller se faire f….e» car l'accord ne le regardait en rien. On a connu plus fin psychologue, et surtout plus fin historien! Le concept d' «espace humanitaire et économique commun de l'Atlantique au Pacifique» laisse donc supposer que le rapprochement entre l'Ukraine et l'Europe ne pourra se faire contre la Russie, mais seulement avec elle. Voici enfin exposée une stratégie politique européenne qui fait de l'Ukraine un pont et non un mur entre deux mondes. Cette stratégie franco-allemande n'est encore qu'une perspective; sa réalisation exige de cheminer sur une ligne de crête. Or, dans la crise ukrainienne, les faux pas sont venus souvent d'une mécompréhension des volontés des différents acteurs, à commencer par celle de Vladimir Poutine, dont les redoutables qualités de tacticien ont jusqu'ici mis à mal le jeu occidental. Un détour par la culture de négociation russe peut servir d'éclairage. Dans cette perspective, Vincent Eurieult, professeur de négociation à l'ESCP Europe, a récemment examiné l'exemple de la crise des missiles de Cuba de 1962. En avril 1961, avec le débarquement raté de la baie des Cochons, les États-Unis ne sont pas parvenus à écarter du pouvoir le révolutionnaire Castro. Nikita Khrouchtchev a alors joué une partie d'échec avec le Président Kennedy, dont le premier est sorti grand vainqueur: en six jours de négociation de crise, le président américain n'a eu d'autre choix que d'accepter l'inacceptable, la présence du premier État communiste sur le continent américain. La stratégie de Khrouchtchev ne laissait aucune chance au président Kennedy. Avec l'installation de missiles soviétiques à Cuba en 1962, à 200 kilomètres des côtes américaines, le Soviétique plaçait son adversaire dans une situation très simple: un conflit nucléaire en répliquant ou accepter un accord dans une position de relative faiblesse. La raison l'a emporté: le président américain choisit un accord, acceptant la présence d'un pouvoir communiste à Cuba. Comme le dit Vincent Eurieult, «Nikita Khrouchtchev n'a jamais eu l'idée d'attaquer les États-Unis sur leur territoire (…) mais le rapport de pouvoir ne pouvait guère varier: il était hors de question pour John Kennedy de tenter un retour au statu quo (…), il voulait le retrait des missiles, rien de moins (…). Dans cette affaire, John Kennedy a révélé, heureusement, des grands talents de tacticien, mais le russe, Khrouchtchev, en a été l'inoubliable stratège». En avançant le risque d'une guerre totale en Ukraine le Kremlin place dans la balance des négociations un poids trop lourd pour les Occidentaux. La crise des missiles de Cuba est un exemple de négociation de crise à l'état chimiquement pur dans la mesure où l'arme nucléaire a été mise en jeu: elle peut aussi éclairer dans une certaine mesure la stratégie du Président Poutine, dont les conseillers, avant d'être des idéologues nationalistes, sont d'abord des réalistes, anciens du KGB et fins connaisseurs des rapports de force soviétiques. En soutenant discrètement les séparatistes, très motivés, avec du matériel militaire et en tenant un double discours permanent, les Russes placent les Occidentaux dans l'embarras car ils savent pertinemment que personne en Europe n'accepterait de faire la guerre pour le régime de Petro Porochenko au risque d'une folle escalade. En avançant le risque d'une guerre totale en Ukraine -dont l'ambassadeur de France en Ukraine, Alexandre Orlov, se faisait encore l'écho il y a quelques jours sur BFM TV- le Kremlin place dans la balance des négociations un poids trop lourd pour les Occidentaux. Dans cette partie d'échec, le coup de Vladimir Poutine est radical et brutal, mais il montre en creux que le maître du Kremlin ne souhaite pas envahir l'Ukraine: il souhaite en revanche placer son adversaire dans une situation inextricable en faisant exister la perspective d'une telle invasion à laquelle les Occidentaux ne pourraient pas répondre militairement sans prendre un risque de guerre totale. En reprenant la thèse de la Pologne et des États baltes selon laquelle Vladimir Poutine souhaiterait recréer un Empire russe en annexant peu à peu toutes les terres de l'ex-URSS, les néoconservateurs tombent dans le piège que celui-là leur tend et ne voient pas qu'il s'agit d'une stratégie de négociation, de même que Khrouchtchev n'a pas installé des missiles à Cuba pour détruire les États-Unis mais pour les obliger à négocier l'existence d'un État communiste sur le continent américain. Vladimir Poutine a bi