Du bâton pour Pellerin. Par Matthieu Varnier, secrétaire général de COURRIEL.
Du bâton pour Pellerin
Le Guardian1, à Londres, ne s'y est pas trompé : la résistance linguistique française, souvent raillée mais toujours reconnue (à défaut, ces derniers temps, d'être véritablement crainte...), vient d'être officiellement désarmée. Un bulletin de victoire, voilà tout l'article !
« Flower » Pellerin, ministre de la Culture et de la Collaboration, vient en effet de lancer (jeter ?) la Semaine de la langue française par des déclarations si fortes que nombre d'entre nous ont d'abord cru à l'intoxication ; quoi, une ministre de la République, en pleine célébration annuelle de notre belle langue commune –plus encore, dans les vingt ans de l’événement ! – aller franciser serendipity, considérer comme assimilés motion capture (!) et selfie, désavouer la loi Toubon (la « digue inefficace » qu'il serait vain de dresser) ? Narguer les citoyens et l’étymologie en déclarant que « d'ailleurs, dans les mots anglais, on retrouve souvent les racines latines et grecques de notre propre langue » ? Les perles sont si nombreuses que l'on peine à choisir, et que Rires et Chansons cherche désespérément un enregistrement complet de la ministre... Si le ridicule ne tue plus, de nos jours, on se prend à penser qu'il pourrait au moins destituer.
Il n'est que de lire le petit livret de la Semaine2, ou relire directement la dépêche AFP3 pour se rendre à l'évidence : avec son admiration déclarée pour l'anglais (avec lequel il serait si aisé de créer un nouveau mot en en accolant deux anciens), la ministre nous livre le Montoire de la langue française. Douloureux privilège aujourd'hui que d'être les contemporains de cette débâcle.
Mme Pellerin est donc ministre de la Culture comme on est ministre de la Défense : on est obligé de la préparer, mais on va évidemment tout faire pour éviter de s'en servir. – Dire que la Carpette Anglaise4 passe parfois pour désuète, alors que d'aucuns font de tels efforts pour la mériter !
Je vous invite à prendre connaissance de ce billet d'humeur bien senti, qui résume fortement la situation :
Certes, avec une DGLFL5 qui, le 13 octobre dernier, s'interrogeait dans un colloque au Sénat sur la « modernité » de la loi Toubon, et un CSA qui dans la même période réfléchissait de son coté à « assouplir » les maigres quotas de chansons françaises sur nos radio, on pouvait sentir le vent tourner. Mais l'odeur !
Avec nos salutations citoyennes et (plus que jamais) militantes,
M.V., pour le bureau national.
PS : petit rappel de circonstance ; l'Assemblée Générale de l'association, qui se tiendra ce samedi 13h30 au 190bis avenue de Clichy, à Paris.
1 http://www.theguardian.com/world/2015/mar/12/french-must-drop-useless-barriers-against-other-languages-minister et quasiment en traduction dans : http://nouvelles-aujourdhui.com/la-france-prete-a-abandonner-la-resistance-a-langlais/
2 www.culturecommunication.gouv.fr/content/download/111858/1288726/version/1/file/slff15-dossier-presse.pdf
3 http://www.lanouvellerepublique.fr/France-Monde/Actualite/Politique/n/Contenus/Articles/2015/03/11/La-France-n-a-plus-peur-des-mots-etrangers-2253378
4 http://fr.wikipedia.org/wiki/Acad%C3%A9mie_de_la_Carpette_anglaise
5Direction Générale de la Langue Française et des Langues de France http://www.culturecommunication.gouv.fr/Politiques-ministerielles/Langue-francaise-et-langues-de-France/La-DGLFLF/Qui-sommes-nous