L'ancien sous-secrétaire de l’Organisation de coopération de Shanghai (2004-2010) et diplomate, Vladimir Zakharov, explique.
Selon des statistiques publiées par l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les États-Unis, sur le marché mondial de l'armement ont nettement pris la tête (31% des exportations) devant la Russie (27%). Les trois suivants arrivent loin derrière, avec quelque 5% des exportations chacun. La Chine a dépassé l'Allemagne et la France pour devenir le troisième exportateur mondial d'armes. La France aurait pu décrocher la troisième place, «si elle avait livré en novembre dernier le navire de classe Mistral que la Russie n'a pas reçu à cause du conflit dans l’est de l’Ukraine».
A la fin du mois de mars, La Russie a averti la France qu'elle «fera valoir ses droits jusqu'au bout» en cas de rupture du contrat de livraison de deux navires militaires de type Mistral d’une valeur d’1,2 milliard d'euros. Le vice-ministre russe de la Défense, Y. Borissov, a lancé cette mise en garde au moment même où Paris reportait depuis plusieurs mois cette décision difficile.
«En cas de rupture du contrat sur les Mistral, la partie russe fera valoir ses droits jusqu'au bout en vertu des accords passés, et exigera notamment la compensation de tous les préjudices qu'elle pourrait subir», a indiqué le vice-ministre. Il a rappelé que des pénalités étaient prévues en cas de rupture dans le contrat conclu en 2011. «J'espère que nos partenaires français vont tout de même peser le pour et le contre», a-t-il poursuivi. Il a estimé que la rupture du contrat porterait atteinte à la réputation de la France «face à la communauté internationale».
En savoir plus : Le sort des «Mistral» sera décidé avant le mois de mai
On assiste à une situation tout-à-fait deplorable. Sous le dictat des Etats-Unis et des alliés de l'OTAN, Paris s’est vu obligé de renégocier péniblement, suspendre ou perdre plusieurs contrats lucratifs. Le Sipri a relevé que les «efforts considérables de la France pour augmenter ses exportations d'armes» avaient été récompensés uniquement par le contrat passé avec l'Égypte en février dernier. A l'issue d'une négociation ultra-rapide pour ce type de contrats, la France a signé avec l'Egypte un accord portant sur la livraison de 24 avions de combat Rafale construits par Dassault Aviation.
C'est le premier contrat à l'exportation remporté par un avionneur militaire français : auparavant seule l'Armée de l'Air nationale s'était offerte des Rafale. Jusqu'à maintenant, le Rafale avait essuyé six échecs sur le marché international, le plus retentissant ayant été le Brésil avec un manque à gagner monstrueux de 4,5 milliards de dollars pour 36 appareils au profit du fabricant suédois triomphant Gripen. A ne pas manquer, le suspens actuel autour des négociations qui durent depuis janvier 2012 avec l'Inde, un contrat portant sur 126 Rafale pour un montant évalué entre 10 et 16 milliards d’euros. Mais la France a fait volte face en ajoutant un surcoût pour les Rafales.
Des discussions se poursuivent également avec le Qatar pour une commande de 36 appareils. De fait, le Rafale était jugé trop cher et trop perfectionné pour venir équiper des armées dont les besoins opérationnels étaient faibles. Sans oublier les frais d'entretien de ces avions de chasse qui constituent une charge supplémentaire. Mais en général, la cause principale du piétinement est à chercher aux Etats-Unis qui exercent une pression obstinée sur la France pour qu’elle refuse de vendre du matériel de combat comportant des technologies de pointe en vue d’un assemblage local. En premier lieu, cela regarde l' Inde, bien sûr.
Le Sipri a noté également que le volume du commerce mondial d'armes avait augmenté de 16% ces cinq dernières années par rapport à la période 2005-2009, tandis que les exportations francaises sont en perte de vitesse au profit de nouveaux venus, tel est le cas de la Chine par exemple, qui s'impose en concurent surtout en Afrique et Asie méridionale. Pour la France, le marché est en train de se rétrécir au Maroc (18%) et aux pays du Proche Orient et d’Afrique noire francophone. La perte de confiance est cher payée pour la France.
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