Nicolas Dupont-Aignan : « François Fillon est une imposture gaulliste ! »
Propos recueillis par Louis Hausalter
Alors que la purge que le vainqueur de la primaire de la droite veut infliger à l'assurance-maladie fait polémique, le député-maire d'Yerres (Essonne), candidat à l'élection présidentielle au nom de Debout la France, dénonce dans une interview à « Marianne » un projet qui signerait « le début de la fin de la Sécurité sociale ».
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Marianne : François Fillon souhaite « désétatiser » le système de santé en le focalisant sur les affections graves ou de longues durées afin de faire des économies. Vous l’accusez de vouloir « privatiser la Sécu ». Pourquoi ?
Nicolas Dupont-Aignan : François Fillon l’a clairement dit lors de son débat avec Alain Juppé : il considère que les petits risques ne devraient plus être couverts et que la Sécurité sociale devrait se cantonner aux gros risques. Mais il n’y a pas de petits ou de gros risques ! Cette distinction foireuse est une vieille lune que le lobby des assureurs et des mutuelles essaie de refourguer à nos gouvernements depuis vingt ans, parce que ces gens veulent s’emparer de la Sécu. D’ailleurs, le programme de Fillon n’a rien d’étonnant lorsqu’on sait qu’Henri de Castries, ancien PDG d’Axa, a participé à son élaboration.
Non seulement le fait de donner plus de place aux mutuelles coûterait plus cher qu’aujourd’hui, mais cela complexifierait encore la vie des Français. Si on applique le programme de Fillon, c’est le début de la fin de la Sécurité sociale, le coup de grâce donné à un système créé sous De Gaulle à la Libération. Mais c’est toujours la même histoire : quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage.
Pourtant, François Fillon se réclame du gaullisme... comme vous !
François Fillon est un faux gaulliste, une imposture gaulliste ! Le gaullisme, ça commence par l’indépendance nationale. François Fillon a dirigé le gouvernement qui a signé le traité de Lisbonne, un véritable coup d’Etat. On ne peut pas se dire gaulliste si l’on est soumis à Bruxelles ! Le gaullisme, c’est aussi le rassemblement des Français autour d’un projet social. Or, Fillon a un programme thatchérien ultra-libéral. Je respecte ses convictions, mais il ne peut pas se réclamer des mânes du gaullisme avec de telles intentions.
Il n’empêche, le déficit de la Sécurité sociale reste une réalité. Que proposez-vous ?
Il faut le combler par la croissance, donc par la relance économique. Si on crée le million d’emplois que je veux relocaliser, il n’y a plus de problème de la Sécurité sociale ! Pour le reste, mon projet tient en deux points fondamentaux. D’abord, l’augmentation du nombre de médecins en relevant le numerus clausus à 10.000 (il est fixé à 7.633 pour 2016, ndlr). Ensuite, il faut remettre d’aplomb la médecine de ville, qui a été saccagée ces vingt dernières années, en reprenant en main la gestion des hôpitaux.
Je ne suis donc pas en train de dire qu’il ne faut pas être rigoureux. Cela fait des années, par exemple, que je réclame de ne plus rembourser des médicaments inutiles, mais l’Etat n’est pas assez fort face aux acteurs privés et aux lobbies. La Sécu n’a pas un problème d’excès de dépenses, mais de gaspillage. La France est l’un des seuls pays au monde où, que l’on soit riche ou pauvre, on est soigné. Cela doit rester le cas.
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