Par Michel Raimbaud, le 16 novembre 2017
Ô stupeur, ô merveille de la liberté de l’info, les médias des « grandes démocraties » occidentales viennent de découvrir un sujet susceptible d’activer la compassion de nos chaumières, de nos salons et des milieux où l’on pense bien :
Il est vrai que les esclavagistes, vendeurs comme acheteurs, ne sont pas de chez nous, et que les esclaves en promotion pour quelques centaines de dollars pièce viennent du Niger, du Nigéria, du Mali, de Côte d’Ivoire et de Afrique subsaharienne (comme on dit). Il n’y a apparemment pas de français, ni parmi les victimes, ni parmi les coupables. Il est vrai également que l’histoire se passe en Libye, un pays où l’on s’était habitué aux « foucades » du Guide et aux étrangetés de sa Jamahiriya, ce qui aurait pu tout expliquer jadis…
L’ennui, – nos gens d’écrans, de micros et de gazettes ne le savent peut-être pas ou l’ont oublié – c’est qu’il n’y a plus d’État libyen et que nos pays sont directement responsables de sa disparition et du « chaos constructeur » qui l’a détruit, sans oublier l’assassinat du Colonel rebelle qui défiait l’Occident :
« Vous mélangez tout », « je ne comprends pas » me diront nos propagandistes et inconditionnels de la doxa. Ils ont raison : la vente diront nos propagandistes et inconditionnels de la doxa. Ils ont raison : la vente d’esclaves, ce n’est pas pareil. Et puis au moins nos médias auront fini par révéler ce que toute personne normalement constituée et normalement intelligente pouvait savoir. Il suffisait de lire ou d’écouter :
- écouter « des complotistes » ?
Vous n’y pensez pas, s’excuseront beaucoup d’entre eux afin de continuer à être admis au club des faussaires. Nous, les vrais de vrais, nous avons confiance dans la presse de notre pays…
Ne faisons pas trop la fine bouche, malgré notre indignation devant l’hypocrisie, le cynisme et la lâcheté.
Il serait enfin urgent de lever l’omerta sur le martyre du peuple du Yémen où toutes les infrastructures ont été détruites et où les Saoudiens et leurs alliés s’acharnent sur tout ce qui bouge, les Yéménites étant exposés aux bombes, à la faim et au choléra, dans un silence sidéral de la « communauté internationale ».
Allez, hommes et femmes de l’info, de la politique et de la pensée, ouvrez les yeux, débouchez-vous les oreilles, remuez un peu vos méninges, pour dire enfin la vérité sur ces entreprises de mort avant qu’elles ne débouchent sur une issue que vous ne prévoyiez peut-être pas. Dans le désastre médiatique, intellectuel et politique, sauvez au moins les meubles et ce qui reste d’honneur à nos pays.
Michel Raimbaud, le 16 novembre 2017
Michel Raimbaud est ancien ambassadeur de France, professeur au Centre d’études diplomatiques et stratégiques, officier de l’ordre national du Mérite, chevalier de la Légion d’honneur.