(B2) La Conférence de sécurité de Münich est devenue un des lieux d'expression sur la situation du monde et la sécurité. Bien entendu, nombre de propos à cette conférence ont été calibrés pour répondre aux dernières déclarations américaines, sur les relations entre l'OTAN et l'UE (lire : Les États-Unis plombent l’autonomie stratégique de l’Europe avec un slogan : pas sans nous !). Mais c'est l'ensemble des crises internationales, en Syrie, en Iran, en Corée du Nord comme en Europe (Brexit, Shoah) qui ont aussi animé les débats.
L'Europe et l'OTAN
Le besoin d'une culture stratégique commune
« Je crois que nous avons aussi besoin d'une PESCO en politique étrangère et d'une culture stratégique commune. » Il faut « un pacte global et en réseau pour la sécurité. Bien que l'armée apporte une contribution significative à la résolution des crises et des conflits, il n'y a pas de raccourci purement militaire pour un ordre de paix stable et à long terme ». Ursula von der Leyen (ministre allemande de la Défense).
L'Europe n'est pas un luxe
« Dans ce nouveau monde qui naît dans la douleur, l’Europe n’est pas un luxe : elle est une nécessité ». « Nous devons faire évoluer nos institutions, le succès de l’Europe de la défense ne viendra pas des institutions, mais des opérations. […] Il s’agit de faire émerger une culture stratégique commune parmi les Européens. […] Ce ne doit pas être un concept, mais une pratique. » Florence Parly (ministre française de la Défense).
L'initiative européenne d'intervention
L'Initiative européenne d’intervention – présentée par Emmanuel Macron – permettra aux Européens de faire face aux menaces dans leur voisinage immédiat « y compris lorsque les États-Unis ou l’Alliance souhaiteront être moins impliqués ». Ce qui suppose une « autonomie stratégique », c’est-à-dire « une capacité à intervenir sans obliger les États-Unis à venir à notre chevet, sans qu’ils détournent leurs moyens ISR [reconnaissance, surveillance, renseignement] ou leurs ravitailleurs d’autres missions, ailleurs. » Florence Parly (ministre française de la Défense). Lire : L’initiative européenne d’intervention se prépare pour l’été
L'Europe sans opérations est un sujet de colloque
« Si l'Europe de la Défense ne s'accompagne pas d'un engagement opérationnel plus important des États membres, elle demeurera longtemps un sujet de colloque. [...] Si l’Europe ne s’intéresse pas à la guerre, la guerre, elle, ne manquera pas de s’intéresser à l’Europe » Edouard Philippe (Premier ministre français)
L'Alliance atlantique, le moyen de dissuasion idéal
« L'OTAN et l'Alliance transatlantique constituent le moyen de dissuasion crucial qui maintient l'Europe en sécurité. Nous n'aurions jamais coopéré à la PESCO si nous avions eu le sentiment que cela ferait double emploi avec l'OTAN » Jüri Luik (ministre estonien de la Défense).
Une Europe a besoin d'un peu de hard power
« Parfois, le soft power n'est pas assez puissant. L'Europe a besoin de plus de force en matière étrangère, de sécurité et de défense. [...] Nous devons nous émanciper. Mais nous ne nous affranchissons pas contre l'OTAN et pas contre les États-Unis. » Jean-Claude Juncker (président de la Commission européenne).
Veto sur les décisions de politique étrangère et puissance forte
« Pour pouvoir parler d'une seule voix de manière décisive, l'Union européenne doit simplifier la prise de décision interne. Le Traité prévoit la possibilité de passer de l'unanimité au vote à la majorité qualifiée pour certaines questions de politique étrangère. » Jean-Claude Juncker (président de la Commission européenne).
«Alors que les budgets européens de défense augmentent, nous devons faire attention à dépenser efficacement et concentrer notre recherche sur les défis à venir, en gardant à l'esprit qu'une approche universelle ne fonctionnera pas », Jorge Domecq (directeur de l'Agence européenne de défense)
Les crises européennes
Brexit : pas de nouveau référendum
« Nous quittons l'Union européenne, il n'y aura pas un deuxième référendum. » Theresa May (Premier ministre britannique). Lire aussi : Un grand accord UE-UK de sécurité en 2019. Associez-nous aux décisions, nous paierons, promet Theresa May
La Pologne et la Shoah
A propos de la nouvelle loi polonaise incriminant l'expression "camps polonais de la mort". « Ce ne sera pas punissable, ce ne sera pas regardé comme criminel de dire qu’il y eut des coupables polonais, de même qu’il y eut des coupables juifs, des coupables russes, des coupables ukrainiens, et pas seulement des coupables allemands ». « Nous ne condamnerons pas ceux qui disent que des Polonais ont tué des juifs. Mais sachez que la Pologne était le seul pays où des citoyens étaient tués par les nazis pour avoir aidé des Juifs », Tomasz Morawiecki (Premier ministre polonais).
Les crises internationales
Corée du Nord : faire pression sur le régime
« Nous devons faire pression sur le régime Kim, en utilisant tous les outils disponibles », H. R. McMaster (conseiller à la sécurité nationale des États-Unis).
Syrie : la crainte d'une déflagration
« Jamais depuis quatre ans on avait vu des grands pays s'engager militairement, directement à l'intérieur de la Syrie. Cela a entraîné des incidents et c'est inquiétant. [...] Nous espérons que ces pays vont continuer à se montrer responsables, car sinon la situation pourrait échapper à tout contrôle », Staffan de Mistura (envoyé spécial pour la Syrie de l'ONU).
« Je crois que deux États pour deux peuples, c'est dans l'intérêt d'Israël. Je crois que nous devons être celui qui initie les négociations. Ce n'est un secret pour personne que le Premier ministre et moi avons des opinions différentes sur cette question. Je crois que la sécurité d'Israël et la nécessité de garder les valeurs des Juifs et d'un État démocratique nous obligent à aller dans cette direction, et j'espère que nous trouverons un partenaire de l'autre côté », Tzipi Livni (ancien ministre des Affaires étrangères d'Israël).
Des propos pour l'image
C'est votre drone ?
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a brandi un morceau d'un drone iranien, abattu au-dessus du territoire israélien la semaine dernière, demandant au Premier ministre iranien Mohammad Javad Zarif, présent aussi à Münich, s'il « le reconnaît ». « Ne testez pas la détermination d'Israël » a-t-il ajouté.
Une aspiration européenne pour l'Ukraine
Le président de l'Ukraine Petro Poroshenko est venu à la conférence de Münich avec le drapeau européen avec lequel les soldats ukrainiens se battaient pour Avdyivka, et une demande de soutien continu pour les réformes de l'Ukraine et les aspirations européennes.
(propos observés et mis en forme par Nicolas Gros-Verheyde)
Télécharger :
- l'agenda de la conférence de Münich
- la liste des participants
- le rapport soumis à la conférence