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Le blog de Lucien PONS

Sergueï Skripal: cet espion qui tombe à pic. Par Karine Bechet Golovko

10 Mars 2018 , Rédigé par lucien-pons Publié dans #Europe supranationale, #La France, #AMERIQUE, #L'OTAN., #La Russie, #Le capitalisme;, #l'Angleterre

samedi 10 mars 2018

 
Sergueï Skripal: cet espion qui tombe à pic
 
 
 
Sergueï Skripal, de nationalité russe, ex-agent du GRU (service du renseignement militaire russe), retourné par les services de Sa Majesté, vient d'être retrouvé inconscient à Londres, sur un banc, avec sa fille. Pour autant, la Russie est coupable. Sans être particulièrement originale, la démarche est prévisible. Vivement, la fin de la campagne électorale, que les "partenaires" occidentaux reprennent un peu leur soufle, ils font bientôt nous faire un burned-out à ce rythme-là.
 
 
Segueï Skripal était un agent russe qui travaillait pour le renseignement militaire. Il fut retourné par le MI6, jugé en 2006 en Russie pour trahison d'Etat et condamné à 13 ans de privation de liberté. Avec le scandale des espions dormants, il fut échangé en 2010 et obtint alors refuge à Londres. Ce qui confirme bien qu'il est un espion anglais et non russe. Le 4 mars, il est trouvé sur un banc à Salisbury, inconscient, avec sa fille. Tous les deux sont hospitalisés dans un état grave pour avoir été contaminés par une substance neurotoxique paralysante. Pour l'instant, les enquêteurs ne savent pas où et comment ils ont été contaminés.
 
Immédiatement, la machine politico-médiatique se met en marche, alors que l'enquête ne fait que commencer. Dans la multitude des articles sur le sujet, un est particulièrement intéressant, il s'agit de l'éditorial publié dans The Guardian. Un tel niveau de paranoïa, dans ce qui n'est pourtant pas de la presse de boulevard, est incroyable. Tout commence évidemment avec V. Poutine, qui a déclaré que ce qu'il regrette le plus est la chute de l'URSS, l'empoisonnement doit être interprété dans ce contexte. Donc:
The Russian president’s project is the reversal, at any cost, of a humiliating defeat by the west.
Et tout est remis sur la table, la modernisation de l'armée, l'opposition, les élections. Le tout dans n'importe quel ordre, comme un cri hystérique, une incantation se devant libératrice. Bref, un manque de contrôle sur soi. Une sorte d'infantilisme politico-journalistique:
If confirmed as a Russian action, the use of a chemical weapon on British soil would be an act of extreme hostility, suggesting Mr Putin is seeking to demonstrate a capacity to project aggressive power unimpeded around the globe. A similar message was conveyed by the Russian president’s recent speech boasting of new “invincible” nuclear missiles. Some of this is for domestic consumption. He will win the presidential election on 18 March: no other outcome is permitted. But he still likes to burnish his strongman credentials. And repressive regimes must always be advertising their ruthlessness to deter public dissent. 
 
Quel est le rapport entre un vieil espion sorti du circuit depuis des années, qui a déjà donné tout ce qu'il pouvait, et la modernisation de l'armée ou les élections? Aucune, mais peu importe, tout est dans la suggestion. Remarquez, les médias français sont encore plus médiocres, avec des "experts", dont la puissance de réflexion est incroyable. Exemple sur LCI:
 
 
Lénine et évidemment Staline, la culture criminelle (d'Etat?, puisqu'il s'agit quand même de dirigeants), l'opposition, les transfuges, tout y est, toute la fantasmagorie. Et ça, ce sont des experts. Et dire que des personnes de ce niveau de réflexion ont travaillé dans le contre-renseignement français, notamment contre l'URSS. Ca nous oblige à réfléchir ... et ça explique beaucoup de choses.
 
Bref, la Russie est responsable avant que l'enquête n'ait abouti. Ce qui est devenu une tradition, celle assez peu démocratique de l'ingérence politique dans la justice. Clouer au pilori médiatique:
 
source: Ambassade russe en Grande-Bretagne
Et si elle est responsable, elle doit payer. Et comme elle est responsable, réfléchissons à la manière de lui faire payer. Le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, s'est quelque peu emballé. Il menace de retirer la Grande-Bretagne de la Coupe du Monde de foot, ce qui ne provoque pas un soutien particulier dans la population et a obligé Theresa May à préciser qu'il ne s'agit que de la représentation diplomatique et politique du pays.
 
Dans une poussée supplémentaire russophobe, B. Johnson a également menacé de prendre des mesures de rétorsion inédites si l'implication de la Russie se confirme.
“No attempt to take innocent life on UK soil will go either unsanctioned or unpunished”, the Foreign Secretary said, as he also accused Moscow of undermining the “fundamental basis of international order” by its past actions in Crimea and through election meddling.
Ici comme ailleurs, quel est le rapport entre ce vieil espion transfuge et la Crimée? Aucun, mais peu importe puisque:
Branding Vladimir Putin’s government a “malign and disruptive force”, he said harsher international sanctions could be imposed if it is found to have had a hand in the attack on Mr Skripal.
Ce n'est pas très sérieux? Non, mais puisqu'il faut réalimenter constamment la machine, ça tombe bien. Ca tombe même très bien. A une dizaine de jours des élections présidentielles pour rappeler à quel point la "Russie de Poutine" est dangereuse, avant la Coupe du monde pour rappeler à quel point cette Russie est infréquentable. Surtout après le discours de V. Poutine ayant provoqué la panique dans les chancelleries occidentales face aux nouvelles armes russes. Sans oublier que la Russie ne lâche pas en Syrie et se pose en concurrent ayant un réel potentiel géopolitique. 
 
L'ambassade de Russie en Grande-Bretagne rappelle que les accusations montées en épingle sont un grand classique:
 
 
Pour la Russie, il ne s'agit que d'une étape de plus dans la politique russophobe qui s'est emparée de l'Occident. Aucune information n'a été partagée par les enquêteurs anglais, pourtant il s'agit de ressortissants russes... Mais que partager? La démarche est (géo)politique et elle se développe en tant que tel.
 
Constat assez triste, mais que reste-t-il à cet étrange Occident sinon les sanctions, les cris, les alarmes, les espions venus du froid tombés raid à Londres, les armes chimiques? Il reste à faire de la politique, mais c'est plus compliqué. En attendant d'avoir de véritables hommes d'Etat, en attendant d'avoir à nouveau des Etats, il y a de la comm et des marionnettes. Il nous reste à survivre sans trop de pertes à cette époque.
 
 
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