Le génocide de la nation grecque a commencé par Paul Craig Roberts.
par Paul Craig Roberts
vendredi 31 août 2018, par Comité Valmy
La dissimulation politique et médiatique du génocide de la nation grecque a débuté hier (20 août), avec les déclarations politiques de l’Union européenne et autres annonçant la fin de la crise grecque. Cela veut dire que la Grèce est finie, morte. Ayant été exploitée jusqu’à l’os, sa carcasse est jetée aux chiens.
Trois cent cinquante mille Grecs, principalement des jeunes et des spécialistes, ont fui la Grèce morte. Le taux de natalité est de très loin inférieur à ce qui est nécessaire pour maintenir la population restante. L’austérité imposée aux Grecs par l’UE, le FMI et leur gouvernement, a fait fondre de 25% l’économie. Le déclin est l’équivalent à celui de la Grande Dépression aux États-Unis, mais les effets sont pires en Grèce. Le président Franklin D. Roosevelt avait atténué l’impact du chômage massif avec la loi sur la sécurité sociale et d’autres éléments de dispositif de protection, comme l’assurance-dépôts et des programmes de travaux publics, tandis que le gouvernement grec, se conformant aux ordres du FMI et de l’UE, a aggravé le choc du chômage de masse en supprimant le filet de la sécurité sociale.
Traditionnellement, quand un pays souverain se trouve dans l’impossibilité de rembourser ses dettes, que ce soit à cause de corruption, mauvaise gestion, malchance ou événements imprévus, les créanciers du pays réduisent le service de la dette au niveau pouvant être remboursé.
Pour la Grèce, le jeu a été changé. La Banque centrale européenne, dirigée par Jean-Claude Trichet, et le Fonds monétaire international, ont statué que la Grèce devait payer l’intégralité des intérêts et du principal de ses obligations d’État détenues par des banques allemandes, néerlandaises, françaises et italiennes.
Comment cela a-t-il été réalisé ?
Ces deux organismes ont considérablement aggravé la crise de deux façons, et ils laissent aujourd’hui la Grèce dans une situation bien pire qu’au début de la crise, il y a près de dix ans.
Au début de la « crise », qui aurait pu être facilement résolue en réduisant une partie de la dette, celle-ci représentait 129% du produit intérieur brut grec. Aujourd’hui, la dette grecque représente 180% du PIB.
Pourquoi ?
Afin de payer les intérêts à ses créanciers, pour qu’ils ne perdent pas un centime, un supplément d’argent a été prêté à la Grèce. Le prêt additionnel, qualifié de « renflouement » par la pressetituée financière, ne visait pas à remettre à flot la Grèce. Il s’agissait d’un plan permettant de rembourser les créanciers.
Le régime Obama a favorisé ce plan car, comptant sur lui, les banques étasuniennes avaient vendu des couvertures de défaillance sur la dette grecque. Sans ce « renflouement, » les banques étasuniennes auraient perdu leur pari et payé une assurance [inutile] contre la défaillance des obligations grecques.
En outre, la Grèce a été tenue de vendre son patrimoine public à des étrangers et de réduire le filet de sécurité sociale. Elle a dû, par exemple, diminuer les retraites en dessous du revenu vital, et réduire radicalement les soins médicaux, de sorte que les gens meurent avant de pouvoir se faire soigner.
Si ma mémoire est bonne, la Chine a acheté des ports grecs. L’Allemagne a acheté l’aéroport. Diverses entités allemandes et européennes ont acheté les compagnies municipales de distribution d’eau. Les spéculateurs immobiliers ont acheté des îles protégées pour y développer l’immobilier.
Ce pillage du patrimoine public grec ne visait pas à réduire la dette de la Grèce, il allait avec le paiement des intérêts des nouveaux prêts.
Plus grande que jamais, la dette grecque est toujours là. L’économie est plus insignifiante que jamais, tout comme la population grecque à qui la dette est attribuée.
La déclaration de fin de la crise grecque n’a fait qu’annoncer aux banques étrangères qu’il n’y a plus rien d’intéressant à tirer des Grecs. La Grèce coule rapidement. Tous les revenus associés aux ports maritimes, à l’aéroport, aux services municipaux et au reste des biens publics qui ont été privatisés de force, vont désormais dans la poche d’étrangers. Ils sortent l’argent du pays et font ainsi couler toujours plus l’économie grecque.
Les Grecs ne se sont pas seulement fait voler leur avenir économique. Ils ont aussi perdu leur souveraineté. La Grèce n’est plus une nation souveraine. Elle est dirigée par l’UE et le FMI. Dans mon livre de 2013, The Failure of Laissez Faire Capitalism, dans la partie III, « La fin de la souveraineté, » j’ai clairement décrit la manière dont cela se ferait.
Les Grecs ont été trahis par le gouvernement Tsipras. Ils avaient la possibilité de se révolter et d’utiliser la violence pour renverser le gouvernement qui les vendait à des banquiers internationaux. Au lieu de cela, les Grecs ont accepté leur propre destruction et n’ont rien fait. Au fond, la population grecque s’est suicidée.
La crise financière mondiale de 2008 n’est pas terminée. Elle a été balayée sous le tapis par la création massive d’argent des banques centrales étasunienne, européennes, britannique et japonaise. Cette création de monnaie a largement distancé la croissance de la production réelle et majoré la valeur des actifs financiers au-delà de ce qui peut être soutenu par la réalité du terrain économique.
Il reste encore à voir comment va évoluer cette crise. Elle a la capacité d’entraîner la destruction de la civilisation occidentale. Les pays vont-ils se dévorer entre eux ? Après la Grèce, est-ce que ce sera le tour de l’Italie, de l’Espagne, du Portugal, de la France, de la Belgique, de l’Australie et du Canada, jusqu’à ce qu’il n’en reste aucun ?
Le monde occidental entier vit dans les mensonges fomentés par de puissants groupes d’intérêt économique pour servir leurs intérêts. Les médias indépendants n’existent pas, sauf sur Internet, et ils sont diabolisés et leur accès est dit indigne de confiance. Les gens qui vivent dans un monde d’informations contrôlées n’ont aucune idée de ce qui se passe en ce qui les concerne. Ils ne peuvent donc pas agir en fonction de leurs propres intérêts.
Paul Craig Roberts
21 août 2018
Ancien Secrétaire Adjoint au Trésor pour la politique économique, Paul Craig Roberts a tenu de nombreux postes universitaires, a été rédacteur en chef adjoint du Wall Street Journal, chroniqueur de Business Week, Scripps Howard News Service et Creators Syndicate, et il a écrit aussi de nombreux ouvrages, dont l’un, L’Amérique perdue : Du 11 septembre à la fin de l’illusion Obama, a été traduit en français. |
Traduction Petrus Lombard
Source : Réseau International