Exclu de son groupe de recherche à l'Université de Limoges, un sociologue voit un lien entre son éviction et son opposition ouverte à la promotion de thèses «racialistes» au sein de l'université.
Le message posté sur Facebook date du 30 novembre, mais il n'a été révélé que le 12 décembre par nos confères du Point. Le sociologue Stéphane Dorin y dénonce son éviction, décidée en Assemblée générale par le vote d'«une très large majorité», de son laboratoire universitaire : le groupe de recherches sociologiques sur les sociétés contemporaines (Gresco) de l'Université de Limoges.
Le sociologue affirme recevoir des pressions au sein de son établissement depuis qu'il s'est opposé, en 2017, à la tenue d'une conférence-débat animée par la co-fondatrice du Parti des indigènes de la République (PIR), Houria Bouteldja, dans le cadre d'un «séminaire d'études décoloniales» organisé par l'université. Stéphane Dorin avait demandé par lettre ouverte l'annulation de cette venue en raison des «prises de position racialistes» de la militante, connue pour ses sorties tonitruantes ayant souvent fait l'objet d'accusations de racisme, parfois d'antisémitisme et d'homophobie.
Son nom a été cité le 28 novembre dans une tribune co-signée par plusieurs intellectuels et universitaires dénonçant l'influence grandissante et délétère du «mouvement "décolonial" et ses relais associatifs», dans le domaine de l'éducation et de la culture. Les philosophes Alain Finkielkraut, Elisabeth Badinter, Jean-Claude Michéa ou des personnalités médiatiques telles que le journaliste Bernard de La Villardière, mais aussi des universitaires et des avocats, ont apporté leur soutien à ce texte.
Dans son message sur le réseau social, le sociologue s'inquiète par ailleurs de l'arrivée de la députée insoumise Danièle Obono, «amie de Houria Bouteldja», au sein du Conseil administration de l'UFR de Science Politique de Paris 1. «L'ironie, ou plutôt la tragédie, c'est que je suis membre associé du laboratoire, le CESSP, adossé en partie au département de Science Politique de Paris», explique le sociologue qui craint d'être de nouveau évincé à Paris en raison de ses prises de positions.
«Je conclurai par une note que je voudrais positive, car il me semble que de plus en plus de personnes ne veulent plus laisser passer ce danger racialiste», se réjouit cependant l'universitaire à la fin de son texte.
Mais pour l'heure, aucun lien entre l'opposition de Stéphane Dorin à Houria Bouteldja et son éviction de l'université de Limoges n'est établi. Ce vote serait en fait, selon les différents témoignages recueillis par Le Point, la confirmation d'une demande de changement de laboratoire demandée par l'intéressé lui-même le 24 avril 2018, demande qu'il aurait «retirée par la suite» mais qui a tout de même été examinée.
Selon la direction de l'université contactée par l'hebdomadaire, un entretien est prévu avec Stéphane Dorin, en congé maladie pendant ce vote, pour décider des suites à donner à la procédure de changement de laboratoire.
Le sociologue quant à lui critique la légalité de ce vote par le biais de ses avocats. Il a prévu de contester son résultat devant la justice.
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