NICE - Deux jours après l'acte XIX des gilets jaunes à Nice, pendant lequel une militante altermondialiste de 73 ans a été grièvement blessée à la tête, la chaîne CNEWS a diffusé, ce lundi 25 mars, une interview de cette dame (à écouter en vidéo plus bas) peu de temps avant sa lourde chute lors de la dispersion de la manifestation.
Alors que la situation est calme sur la place Garibaldi, qui fait partie de la zone où il y a interdiction de manifester mais qu'une cinquantaine de militants ont bravée -dont elle-, Geneviève Legay explique tout d'abord que "l'arrêté, on ne l'a pas eu. Donc on a donné rendez-vous à 10 heures pour se rassembler pacifiquement". "On ne va pas aller agresser ni le président chinois ni le président français, ajoute celle qui est porte-parole de l'organisation altermondialiste Attac (06). On est là pour dire qu'on a le droit de manifester."
"On quittera (la place) quand on voudra. Après, s'ils (les forces de police, NDLR) prennent la force, on verra bien", dit encore la septuagénaire qui porte un gilet jaune.
"Vous n'avez pas peur madame?", lui demande alors le journaliste. "Non, vous savez, j'ai 73 ans: qu'est-ce qui peut m'arriver? Moi je me bats pour mes petits-enfants, 50 ans que je suis sur le terrain, donc voir ce que je vois aujourd'hui, c'est à pleurer", répond-elle. "Vous allez rester ici place Garibaldi?", lui demande encore le journaliste. "Je resterai ici tant que je le déciderai moi", conclut avec aplomb Geneviève Legay.
Peu de temps après cette interview, elle sera bousculée lors d'une charge des forces de police pour disperser les manifestants. Sa tête heurtera un petit poteau positionné le long des rails de la ligne 1 du tramway.
Des plaintes déposées
Ce lundi, la polémique enflait autour des conditions dans lesquelles cette militante a été blessée, alimentée notamment par des déclarations d'Emmanuel Macron qui a estimé qu'elle aurait dû éviter de manifester dans un périmètre interdit.
Le président de la République a souhaité à la septuagénaire un "prompt rétablissement, et peut-être une forme de sagesse": "quand on est fragile, qu'on peut se faire bousculer, on ne se rend pas dans des lieux qui sont définis comme interdits et on ne se met pas dans des situations comme celle-ci", a estimé le chef de l'État dans un entretien à Nice-Matin.
Même son de cloche chez le maire LR de Nice. "Ça suffit de taper sur la police! Il y avait une interdiction de manifester. Je souhaite un prompt rétablissement à cette dame qui (...) aurait pu parfaitement manifester à 14h là où c'était autorisé", a déclaré Christian Estrosi.
Une enquête a été ouverte pour déterminer précisément le déroulé des faits qui ont valu à Geneviève Legay d'être hospitalisée pour de multiples fractures.
Selon le procureur de la République de Nice, la septuagénaire n'a "pas été touchée intentionnellement", et n'a eu "aucun contact avec un agent de sécurité" mais est tombée après avoir été "poussée". "Elle a été poussée, la chute est intervenue alors que les forces de l'ordre intervenaient pour une action de dispersion", a indiqué Jean-Michel Prêtre ce lundi lors d'une conférence de presse, précisant que Geneviève Legay "présentait une plaie à l'arrière du crane". Mais "il est difficile de savoir qui exactement était derrière elle", a-t-il ajouté.
Son avocat, Me Arié Alimi, a porté plainte, lundi en début d'après-midi, pour "violence en réunion avec arme par personnes dépositaire de l'autorité publique contre personne vulnérable, une plainte qui vise aussi le préfet en sa qualité de donneur d'ordres".
Il a porté également plainte pour "subornation de témoins", accusant les policiers d'avoir tenté de faire dire à Geneviève Legay, toujours hospitalisée lundi, "qu'elle aurait été poussée par un caméraman", a précisé sa consœur niçoise chargée du dépôt de la plainte au tribunal. L'association Attac a également formalisé une plainte pour violence.
Un rassemblement de soutien à la septuagénaire doit se tenir en fin d'après-midi sur la place Garibaldi.
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