Un questions-réponses réalisé avec Angélique Kourounis, à Athènes, en Grèce

Affiches appelant à la grève en Grèce © Radio France - 2012 / Marion L'Hour
La Grèce s’apprête à vivre une semaine difficile, puisque ses 16 les bailleurs de fond européens exigent de nouvelles mesures d'austérité pour continuer à prêter au pays. Et cette fois-ci, ce sont bel et bien tous les salaires qui sont visés.
Effectivement, mais cela s'est fait petit à petit. Il y a deux ans, on a diagnostiqué, en Grèce, un état pléthorique à l'origine, entre autres, des déficits du pays et de la dette et donc, on a dégraissé. On a ainsi supprimé les 13ème et 14ème mois qui correspondaient en fait aux congés payés, tellement les salaires étaient bas. On a baissé, à plusieurs reprises, les salaires des fonctionnaires, les retraites de base et les retraites complémentaires. Avec la nouvelle grille unique des salaires dans la fonction publique, ces derniers ont été divisés par 3. On est passé, par exemple, de 2.200 euros par mois après 25 ans de carrière au ministère des Finances, à 800 euros ! Un cardiologue médecin chef de service touche à peine 1.400 euros en fin de carrière. Les professeurs, eux, touchent désormais 700 euros. Cela, c'était pour le secteur public. Dans le privé, les 13ème et 14ème mois étaient maintenus, les salaires étaient plus élevés. Mais la dérégularisation des conventions de travail imposée par les bailleurs de fond en octobre dernier ont [a] sonné le glas du secteur privé. Maintenant, on l'achève.
- Comment cela ?
Au nom de la compétitivité, on a aboli les conventions collectives et même les conventions d'entreprise. Maintenant, le salarié discute seul de son contrat et les nouveaux contrats sont tous revus à la baisse, d'au moins 20%. Ces réformes-là datent d’octobre. A l'époque, on avait promis que c'étaient les dernières. Mais à présent, les Grecs apprennent que ce n'est pas fini.
- Et donc, à quoi les Grecs doivent-ils s’attendre à partir de lundi prochain ?
A une baisse du SMIC, une baisse des salaires, et l'abrogation des 13ème et 14ème mois dans le privé.
- Effectivement, si cela a été réformé dans le secteur public, est-ce que ce n’est pas logique que le secteur privé aussi le soit à son tour ?
Non, certainement pas. La logique de la baisse des salaires dans le public consiste à réduire les coûts de l'Etat, pas ceux du privé. Bien au contraire, c'est la seule dynamique qu'il reste au marché. Jusqu’où va-t-on baisser le SMIC ? Il est actuellement de 590 euros nets alors que le coût de la vie, en Grèce, est important.
- Comment le FMI, qui est à l’origine de cette baisse, la justifie-t-il ?
Par la productivité. A son avis, -c’est un homme d'affaire grec présent aux discussions avec le FMI qui me l'a dit, il faut que les salaires grecs soient en rapport avec la productivité du pays. Or, selon le FMI, la productivité grecque n'est plus européenne mais balkanique. On parle donc de salaires de maximum 400 euros. Sauf que les Grecs, eux, disent qu’ils se serrent la ceinture depuis deux ans, que les salaires baissent, les taxes augmentent et les déficits se creusent. Alors, pour eux, cette recette n'est pas la bonne ; elle est de plus mal appliquée. La reprise n'est pas au rendez-vous, le pays entre dans sa 5ème année de récession (-5%), une première depuis la guerre. Ils refusent cette logique et des grèves sont déjà annoncées pour les jours à venir.