[Emmanuel Ratier - Faits & Documents n° 357 - Mai 2013]

Après les affaires Dominique Strauss-Kahn et Jérôme Cahuzac, l’incontournable « Mazarin de l’influence », co-président d’Havas Worldwide, qui a tissé depuis trente ans une incroyable toile d’araignée, vient de se faire taper sur les doigts, pour la première fois, par son patron Yannick Bolloré, qui lui a demandé de ne plus signer aucun contrat avec des ministres en exercice. Avec Anne Méaux et Michel Calzaroni, cet ashkénaze multimillionnaire est l’un des trois gourous qui « disposent d’un immense pouvoir d’influence sur la vie politique et économique française ». Un « vrai décideur installé dans l’ombre de notre système démocratique » (Les Inrockuptibles, 23 mars 2011).

« Tout en vitupérant “le capitalisme consanguin et protégé”, Stéphane Fouks cultive soigneusement son réseau de relations politiques […] Adversaire du mélange des genres (une connerie affirme-t-il sans rire), Stéphane Fouks vit de troublants dédoublements. Par exemple lorsqu’il remporte des marchés auprès d’élus que par ailleurs il conseille bénévolement. » Le Canard enchaîné, 31 janvier 2001.

« Il est en mouvement constant, donc assez bordélique mais il est rapide, ça le sauve. » Jacques Séguéla, Stratégies.

« Ce fut un des pince-fesses les plus courus de la capitale : le 25 novembre 2008, dans un salon du ministère du Travail, Stéphane Fouks, se faisait remettre la Légion d’honneur (NDA : sur proposition de l’UMP Laurent Wauquiez) des mains de Xavier Bertrand (NDA : ministre du Travail UMP), sous le regard admiratif de vingt-trois patrons du CAC 40 et de nombreux politiques de tous bords. Près de 300 invités au total ! À 49 ans, cet homme-là est un véritable réseau à lui tout seul […] Mais l’entregent de cet ancien rocardien devenu multimillionnaire ne se limite pas à son portefeuille de clients, loin de là ! Le coeur du système Fouks, c’est d’abord un triangle constitué avec deux copains rencontrés sur les bancs de la fac Tolbiac : le criminologue Alain Bauer, ancien grand maître du Grand Orient de France, et le député socialiste Manuel Valls. S’y ajoutent d’autres fidélités, comme celle qui le lie à Arnaud Lagardère ou à Dominique Strauss-Kahn, dont il a embauché plusieurs très proches collaborateurs. Recaser les amis, en détacher d’autres… La méthode a permis d’essaimer dans les cercles qui comptent. » Le Nouvel observateur, 21 mai 2009 (1).

« Sa proximité avec Dominique Strauss-Kahn l’a fait passer du statut envié de spin doctor d’un futur président à celui de conseiller complaisant – voire complice – de l’homme qui scandalise […] Il tente de transformer pour la galerie le pire danger qui ait menacé sa carrière en expérience édifiante de communication de crise […] Il y a encore quelques semaines, il alimentait volontiers la thèse du “complot” dans l’affaire du Sofitel. Les révélations sur les prostituées du Carlton l’ont saisi par surprise. » Le Monde, 6 novembre 2012.

« Chez Euro RSCG, on adore les remaniements ministériels. Un nouveau ministre qui s’installe, c’est un nouveau marché qui s’ouvre ? Chaque fois, la maison incite ses consultants à accepter les offres d’embauche. “C’est devenu Manpower” […] Dans le gouvernement Fillon, on trouve des petits Fouks un peu partout. Entre autres ministres, Valérie Pécresse, Bernard Kouchner et Frédéric Mitterrand ont chacun à leur côté un expert en relations presse issu de l’agence. » Le Point, 19 novembre 2009.

« Fouks s’est même offert des implants capillaires dans la clinique d’un de ses clients, le député socialiste Jérôme Cahuzac. » Le Nouvel observateur, 21 juin 2011.

En raison des remous provoqués par les affaires Strauss-Kahn et Cahuzac, Yannick Bolloré, vice-président du groupe Havas, certainement en accord avec son père Vincent, a décidé de cesser la signature de contrats avec des ministres en exercice. Il faut dire que le spécialiste de la communication de crise avait personnellement pris en main le « cas » Cahuzac, afin d’épauler la conseillère du ministre, Marion Bougeard, « détachée » de l’agence de lobbying dès la nomination à Bercy du député PS du Lot-et-Garonne. Un « placement » dans le plus pur style de Fouks. Un sévère avertissement pour le lobbyiste socialiste affairiste Stéphane Fouks, patron d’Havas Worldwide, qui travaillait, en sous-main ou indirectement, pour sans doute un tiers des membres de l’actuel gouvernement (mais aussi pour Nathalie Kosciusko-Morizet, dans sa « bataille de Paris »). Il faut dire qu’après l’affaire DSK (on a déjà oublié qu’Euro RSCG avait la communication du FMI pour l’Europe), l’affaire Cahuzac commence à faire désordre et Stéphane Fouks en est désormais réduit à se sauver lui-même. Inventer sa propre com de crise et ses fameux « éléments de langage » qu’il avait jusqu’alors l’habitude de vendre très chers à ses clients. Et ne pas perdre les contrats avec les entreprises qui pensaient d’abord avoir acheté une assurance DSK en prenant un ticket Fouks, puis un ticket Cahuzac en remettant au pot Fouks…

Stéphane Fouks est né le 6 avril 1960 à Paris XVIIe. Il est d’une extrême discrétion sur sa biographie véritable et a oeuvré pour empêcher la parution de sa biographie sur Wikipedia (il n’y en a pas). Il est le fils d’un sous-directeur à la Sécurité sociale né à Odessa, Moïse (indiqué comme Maurice au Who’s Who) Fouks, militant du Parti communiste qui finira mendésiste social-démocrate. Dans sa lettre d’information du 17 juillet 2002, Pierre de Villemarest, généralement très au fait de l’espionnage soviétique, le présentait comme un « cadre du PC d’Odessa aux temps soviétiques ». Sa mère, fille de déportée, est comptable dans une entreprise de maroquinerie. « La famille maternelle est originaire de Pologne et la famille paternelle d’Odessa. Installée dans le Jura puis dans le Lyonnais, celle-ci sera cachée par des habitants durant la Seconde Guerre mondiale […] On assure surtout un judaïsme oecuménique et laïque, plus culturel que cultuel. Le jeune Stéphane ne fait pas Kippour et esquive le rabbin mais il n’échappe pas en revanche aux cornichons Molossol et au pikelfleish (Le Figaro, 2 juin 2001). » Il a épousé le 6 juillet 1985 Véronique Dutrou, fille des imprimeurs d’art Robert et Lydie Dutrou, propriétaires du centre d’art graphique La Métairie Bruyère (Yonne), dont elle est cogérante. 
Enfance en banlieue, à Charenton-le-Pont, histoire familiale entre la Pologne et l’Union soviétique. Marques du militantisme communiste. Petite classe moyenne. Une enfance classique. Il redouble une terminale scientifique pour finir en section économique. Bac avec mention assez bien seulement.

Généralement présenté comme diplômé de Sciences-Po Paris, ce juriste (maîtrise de droit public et DESS de communication politique et sociale à Paris I, où il va se lier étroitement avec Manuel Valls) ne figure pas dans l’annuaire des anciens et n’est donc tout au plus qu’ancien élève non diplômé (il semble qu’il se soit étalé au grand oral, ayant obtenu 6/20 à la question : « Comment devient-on un homme politique ? »). Il se présente quand même dans son CV officiel, sur le site d’ Havas, comme « ancien élève de l’IEP et a longtemps assuré avoir envisagé de tenter l’Ena. Pas gêné, il assurera par la suite que la direction de Sciences Po a proposé de le mettre dans l’annuaire des diplômés pour se rattraper mais qu’il a refusé. Un exemple parfait de la rouerie de ce spin doctor qui donne sa recette au Monde (4 mai 2013) : « La vérité n’est pas la transparence. L’enjeu, c’est de hiérarchiser l’info. On n’est pas obligé de tout dire, mais tout ce qu’on dit doit être vrai. » Son ancienne adjointe Anne Hommel, aujourd’hui à son compte, a parfaitement retenu la leçon : « La vérité n’est pas mon sujet » (Le Nouvel observateur, 25 avril 2013).

Membre des Jeunesses socialistes dès 1975 (section de Charenton), il deviendra vice-président du syndicat étudiant socialo-trotskiste Unef-ID en 1979. Il a déjà son style : « Il avait une grande facilité d’élocution. Il improvisait avec des formules qui faisaient choc. Ce n’était pas un homme de dossier, le fond ne l’intéressait pas (Stratégies, 27 mai 1991). » C’est à ce moment que la Mnef passe du trotskisme au socialisme tendance rose foncé. Ses fonctions lui vaudront d’être mêlé étroitement au scandale de la faillite de cette mutuelle étudiante, ayant notamment été l’artisan de la tentative de rachat de sa filiale marketing et publicitaire Policité par Euro RSCG, alors filiale de Vivendi. Pour prendre le contrôle du syndicat, Fouks connaît déjà toutes les ficelles comme le rapportera Alain Bauer (Le Monde, 6 décembre 2001) : « (pour peser dans les négociations), toutes les dix minutes, Stéphane partait téléphoner et prétendait ensuite rapporter les propos de Michel Rocard alors qu’il sortait immanquablement d’un tête-à-tête avec l’horloge parlante. »

Cofondateur du Mouvement des jeunes rocardiens en 1981, ce vieux routier du syndicalisme étudiant entre au comité directeur du PS l’année suivante (il en est le plus jeune membre, à 22 ans). À Tolbiac, il lie très tôt son destin à deux autres principaux responsables du mouvement jeune rocardien, Alain Bauer et Manuel Valls (à l’époque, la fac est fréquentée par une certaine Valérie Trierweiler). Le premier deviendra Grand Maître au Grand Orient de France et grand manitou de la sécurité en France tandis que le second est l’actuel ministre de l’Intérieur. L’histoire de leur alliance a été rapportée dans un excellent article du Monde, Le Pacte de Tolbiac (27 novembre 2012) : « La politique pour l’un, les réseaux policiers et francs-maçons pour le deuxième, le lobbying et le marketing pour le dernier. C’est à la fac de Tolbiac, en 1980, que Manuel, Alain et Stéphane se sont partagés les rôles et ont posé les bases du futur logiciel de la gauche des années 2000, entre libéralisme et sécuritarisme. »

Comme le rapporte le journaliste Serge Faubert (aujourd’hui directeur de la communication du conseil régional d’Ile-de-France), à l’époque responsable du service d’ordre de la LCR à Tolbiac : « Les rocardiens n’avaient qu’une mission : nettoyer la fac des gauchistes en faisant alliance avec les lambertistes (NDA : autre chapelle trotskiste, largement contrôlée par la CIA, via Force ouvrière), imposer les socialistes à Tolbiac sous l’étiquette d’un nouveau syndicat, fondé en 1989, l’Unef-ID. » Le Monde, qui décrit parfaitement cette entente secrète, retrace la suite de leur ascension commune : « pendant que Stéphane Fouks invente la communication politique et institutionnelle chez Euro RSCG et évite de se montrer trop regardant sur ses clients en Afrique ou en Europe de l’Est, Alain Bauer, surfant sur le développement des polices municipales, se lance dans l’ingénierie sécuritaire et la vidéosurveillance à Vitrolles, Manuel Valls, atypique licencié en histoire dans un monde d’énarques, gravissait les marches du pouvoir. »

Adjoint au directeur de cabinet du ministre de l’Agriculture Michel Rocard en 1983 (grâce à Yves Colmou), ce responsable des Clubs Forum comprend très vite qu’il ne percera jamais au PS en raison de l’hostilité non dissimulée des mitterrandiens et de la séparation des tâches que s’est fixé le trio précité. Il rejoint en 1986 la société Déclic (dont il est coactionnaire avec Eric Basset) qui organisera notamment les concerts de SOS Racisme, avant de lancer, en 1988, RSCG Public, avec Marc Vanghelder, sous l’autorité de Patrick Salomon (grâce au soutien du ministre socialiste Tony Dreyfus). À l’époque, RSCG cherche en effet à monter une branche politique et ce « pistonné sans complexe » (La France du piston, Claude Askolovitch, 1992) sera chaudement recommandé à Jacques Séguéla par Jean-Claude Petitdemange, chef de cabinet du premier ministre Michel Rocard. Il va rapidement y faire son trou : « C’est un commerçant extraordinaire qui vendrait un TV couleurs à un aveugle (Stratégies, 27 mai 1991). »

Ce fils de pub et marchand d’images apparaît comme « le fils spirituel » de Séguéla. Jacques Pilhan, le pape de la communication politique (qui conseillera successivement Mitterrand puis Chirac), le pistonne pour participer en sousmain à la campagne de 1988. Il y passe, passe donc quelques semaines à Matignon, y rencontrant Séguéla. Il s’accroche avec lui sur la communication du référendum sur la Nouvelle- Calédonie. Cela plaît à l’homme à la Rolex, qui l’embauche trois mois plus tard chez Euro RSCG, lui monte son propre secteur et lui apprend toutes les ficelles : « Jacques a toujours veillé sur moi. Il m’a appris à être dans le domaine de la production d’idées et à avoir le droit de revenir sur des idées déjà vendues. À ses côtés, j’ai compris que la générosité n’était pas la plus mauvaise forme de commandement. » De la relation Fouks/Séguéla, Le Nouvel économiste (10 juin 2005) indique : « Il est son père ou son oncle adoptif. Relation complexe ? Reconnaissance du ventre. Affect démesuré entre les deux hommes. Le fils a réussi. Le père a construit son piédestal. Il l’a emmené partout avec lui. Il l’a longtemps imposé à ses côtés. »

En parallèle, il sera cogérant, avec Bernard Langlois, de l’hebdomadaire alternatif d’extrême gauche Politis à partir de 1990, mais en parallèle PDG du très officiel groupe Profession politique (avec Eric Basset et Françoise Piot). Ce n’est qu’en 1992 qu’il annonce finalement ne plus militer directement au PS… mais il ne s’agit que d’une position de façade : son bureau jouxte celui de Gilles Finchelstein, directeur des études d’Euro RSCG Worldwide, directeur général de la Fondation Jean Jaurès, membre du Siècle, ancien conseiller politique de Dominique Strauss-Kahn et Pierre Moscovici.

Conseiller de nombreux maires et élus socialistes, il bénéficie également de nombreux budgets institutionnels ou assimilés (campagne du PS aux élections européennes de 1999, BNP Paribas, EDF, qui sera accusée d’avoir financé la campagne de Lionel Jospin en 2002, Airbus, qui sera accusé d’avoir financé le PS en 2002, Danone, Lagardère, Alcatel, LVMH, Cap Gemini, Microsoft, élection présidentielle de 1995 avec Lionel Jospin, etc.). De 1997 à 2002, il sera « l’homme invisible de Jospin », le conseiller de l’ombre omniprésent à Matignon. Et c’est lui, on l’a bien oublié, qui organisera la calamiteuse campagne présidentielle de 2002.

Mais, en retombant toujours sur ses pattes, avec une méthode bien particulière : « Avant Fouks, la génération de Jacques Séguéla et de Jean- Michel Goudard – le “S” et le “G” d’Euro RSCG – se contentait d’appliquer à la politique les méthodes du marketing. Fouks est plus malin : il a compris avant d’autres que, dans la pub et la politique, ce ne sont pas les méthodes qui sont les mêmes, mais les donneurs d’ordres. Celui qui se trouve dans un cabinet ministériel dirigera demain la communication d’une entreprise publique ou “pantouflera” chez un annonceur du privé.

Pour cet as des réseaux, ceux qu’une alternance ou une défaite prive d’emploi, comme ses conseillers de gauche embauchés en 2002 ou en 2007, seront des relais de choix si les socialistes renouent avec l’exercice du pouvoir en 2012. C’est ainsi que l’on retrouve dans l’équipe Hollande d’anciens salariés d’Euro RSCG, et souvent à des postes de choix : d’Aquilino Morelle, conseiller politique du président, à Gilles Finchelstein, qui veille sur les “discours et les questions de stratégie” de Pierre Moscovici, en passant par Sacha Mandel, conseiller en communication du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, ou Viviane Nardon, son alter ego auprès du président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone (Le Monde, 4 avril 2013). »

On pourrait aussi citer Nathalie Mercier, qui conseille Valérie Trierweiler, Marie- Emmanuelle Assidon chez Laurent Fabius, Emilie Lang-Banaszuk au service de presse de l’Élysée, et toute l’équipe (portraits détaillés dans F&D 297) qui mit sur orbite présidentielle la fusée Strauss-Kahn avant que celle-ci ne se crashe.

C’est ce qui explique aussi que c’est Euro RSCG qui a conseillé Nicolas Sarközy entre les deux tours de l’élection présidentielle de 2007. Le Canard enchaîné (31 janvier 2001) expliquait déjà : « Proche de Jack Lang, il a ainsi décroché un contrat à Blois. Familier de l’ex-ministre RPR des Sports Guy Drut, Fouks a aussi travaillé sur le dossier des JO à Lille. Consultant de l’UDF Jacques Barrot, il a jadis réalisé, pour son ministère des Affaires sociales, la campagne des élections prud’homales. ». Voire qu’il conseille le ministre PS du Redressement productif Arnaud Montebourg lors de ses passes d’armes avec Peugeot alors que, dans le même temps, une autre équipe, de la même agence, conseillait le groupe automobile (cf. Les Gourous de la com, Aurore Gorius et Michaël Moreau, La Découverte, 2012).

Cette figure incontournable de la pub oeuvre aussi à l’étranger. « En 1995, Fouks, enfant d’une lignée juive d’Europe de l’Est, a poussé le socialiste (NDA : ex-communiste) Kwasniewski (N.D.A. : qu’il conseillera jusqu’en 2005) à la présidence polonaise contre un Lech Walesa entouré de cathos réacs ambigus sur la question antisémite. “C’était très important pour mon histoire” Marianne, 23 septembre 1999. » En 1996, il orchestre aussi la campagne du premier ministre israélien Shimon Peres. Depuis lors, il a conseillé le dictateur Laurent Gbagbo (Côted’Ivoire),  Bongo (Gabon), Faure Gnassimbé (Togo), etc.

En 2003, il devient Chief Executive Officer d’Euro RSCG Worlwide et en 2005 coprésident exécutif (depuis l’affaire DSK, le groupe a été rebaptisé Havas Worldwide). Avec Michel Calzaroni et Anne Méaux, il contrôle la quasi-totalité de la communication d’influence en France.

Propriété du banquier d’affaires de gauche Matthieu Pigasse, Les Inrockuptibles (23 mars 2011) a superbement décrit cet univers qu’on croyait sorti de la tête d’un complotiste fou :

« Le grand public ignore leurs visages : on ne les voit jamais à la télé, on ne les entend pas à la radio, on ne les lit guère dans la presse. Pourtant ils pèsent sur tous les médias. Leur obscurité sert leur éclat, leur sous-exposition médiatique illustre leur surexposition stratégique […] Ils ne revendiquent certainement pas le terme de “gourou”, ni celui de “magicien”, ni celui de “faiseur de rois” : les termes “conseiller” ou “codécideurs” leur vont mieux, mais restent trop euphémiques pour éclairer la dérive de leur pouvoir opérationnel. On ne vote pas pour eux mais ce sont eux qui décident ! »

Avec lui, l’entreprise devient une tirelire hyper rentable :

« En la matière, Stéphane Fouks s’impose comme un maître. Fouks régente Euro RSCG, une machine de guerre dans le monde du conseil et de la communication, qui s’accommode de n’importe quel client. Fouks a le carnet d’adresses le plus épais de Paris, avec un atout qui échappe à certains de ses rivaux : ses réseaux à l’international. Chez cet ancien protégé de Jacques Séguéla, le mélange des genres relève d’un art de l’équilibre, théorisé par ses soins. Rapporté par un concurrent, il a une formule éclairante : “Quand on a deux clients dans le même secteur, c’est un conflit d’intérêts ; quand on en a quatre, c’est une expertise.”

Tout en se disant de gauche, il s’entoure de lobbyistes de droite et conseille des leaders de l’UMP, des présidents étrangers parfois peu recommandables, des patrons du CAC 40.

Mais surtout, il manie avec dextérité la pratique anglo-saxonne des revolving doors, ces allers-retours entre cabinets ministériels et agences de communication. Exemple : le secrétaire d’État au logement (NDA : UMP) Benoist Apparu est un ancien d’Euro RSCG. Ces portes tournantes entre privé et public, droite et gauche, ouvrent sur une “immense toile tissée entre les différents lieux de pouvoir”. Avec la plume de l’agence, Gilles Finchelstein, et le démineur de crise Ramzi Khiroun, porte-parole parallèle du groupe Lagardère, Stéphane Fouks manie le “management en râteau”. Bien que tout à fait légale et encadrée par des règles, l’influence de ces conseillers de l’ombre reste un angle mort dans notre système démocratique. Pour une raison fondamentale : les citoyens ignorent tout de leur rôle (Les Inrockuptibles, 23 mars 2011). »

En parfait agent du mondialisme international, il est intervenant régulier auprès de la French American Foundation, la dernière fois lors de la convention des Young Leaders à New York. Mais aussi un familier, en tant que vice-président, du Yalta European Meeting, financé par la plus grosse fortune ukrainienne, l’oligarque Viktor Pintchuk.

Comme pour sa vie privée, le « communicant » Stéphane Fouks ne communique pas du tout sur le montant de sa fortune. On citera donc simplement cet extrait du Nouvel observateur (6 juin 2006) pour une seule année de primes :

« Une poignée de dirigeants de Havas a reçu un beau cadeau […] Selon le rapport annuel 2005, 35 personnes ont bénéficié d’un gros paquet de stock-options. Les coûts de ce plan sont estimés à 45 millions d’euros et pourraient monter jusqu’à 56 millions, soit pratiquement une année de bénéfices ! La majeure partie des options (70 %) a été accordée aux directeurs généraux Stéphane Fouks, Rémi Babinet, Mercedes Erra et au directeur financier Jean-Marc Antoni. Chacun peut espérer une dizaine de millions d’euros à la fin du plan en septembre 2009. »

NOTE :

1. Afin de donner une idée du « réseau Fouks », étaient notamment présents à ce raout : Xavier Bertrand, Jacques Séguéla, Vincent Bolloré, Charles Edelstenne (Dassault Aviation), Denis Ranque (Thales), François Roussely (Crédit Suisse), Didier Lombard (Orange), Yves- Thibault de Silguy et Xavier Huillard (Vinci), Franck Riboud (Danone), Henri Proglio (Vivendi), Henri des Castries (Axa), Philippe Dupont (Banques populaires), Paul Hermelin (Cap Gemini), Bertrand Méheut (Canal +), Bruno Roger (Lazard), Didier Quillot (Lagardère), Serge Tchuruk (Alcatel), Michel Pébereau, etc.

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