C'
’est une question fréquemment posée, en règle générale par un interlocuteur du centre gauche, voire de gauche. À cela on peut apporter les réponses suivantes : en théorie, le basculement vers une Europe fédérale, dotée d’un budget à la mesure de ses ambitions pourrait régler les problèmes posés par l’Euro. Une monnaie unique régit bien l’économie de grands pays dont les diversités régionales sont du même ordre que les diversités entre les économies des pays composant la zone Euro. Mais, cela impliquerait des transferts extrêmement importants entre des pays comme l’Allemagne ou la Finlande et les pays du Sud de la zone Euro. Le montant de ces transferts annuels a été estimé à 12% du PIB de l’Allemagne par Patrick Artus de NATIXIS et d’environ 8% à 10% par mois. Ces transferts devraient être maintenus au moins dix ans et peut-être plus.
Outre que ces transferts sont impossibles à supporter pour l’Allemagne, ils sont contradictoires avec la politique de ce pays, qui cherche à minimiser le coût de son engagement dans la zone Euro. Remarquons que l’Allemagne n’est pas le seul pays à refuser cette solution : de nombreux pays (Finlande, Pays-Bas et Slovaquie) y sont aussi opposés.
Construire une Europe fédérale implique de réaliser des transferts de souveraineté permanents, ce que la majorité des pays de la zone Euro refuse, ou d’aboutir à un cadre non-démocratique, ce qui soulèverait des problèmes dans nombre de pays.
En théorie toujours, il est concevable que la Banque Centrale Européenne se substitue pour un temps à un budget fédéral dont on a mesuré plus haut l’impossibilité, et accepte au refinancement pour l’équivalent (de 220 à 230 milliards) de titres publics des pays concernés. Mais, la permanence d’un mécanisme de rachat permanent des dettes publiques se heurterait alors à l’obstacle de la Constitution allemande. De plus cela déstabiliserait à terme l’économie européenne en créant une situation massive d’aléa moral quant à l’utilisation de cette dette.
En réalité, ces mesures manquent complètement de réalisme. Ceci conduit d’ailleurs à s’interroger sur le sens des déclarations de grands économistes (comme P. Krugman ou N. Pissarides) qui affirment que si ces mesures ne sont pas prises l’euro éclatera. Comme on peut supposer qu’ils savent fort bien que l’adoption de ces mesures est aujourd’hui impossible, cela conduit à s’interroger sur l’autre terme de l’alternative et donc sur le non-dit de leurs déclarations. Mais cela ne trouble nullement les journalistes de Libération