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Le blog de Lucien PONS

SOUVERAINETÉ, DÉMOCRATIE ET INSTITUTIONS INTERNATIONALES. Analyse du M'PEP.

10 Février 2013 , Rédigé par lucien-pons Publié dans #"Comité pour une Nouvelle Résistance-CNR".

Bonjour.
  
Une analyse originale et pertinente qui permet de défendre l'état nation contre la supranationalité sans toutefois replonger dans le repli identitaire. Le piège tendu par les tenants du mondialisme et donc de l'européisme, consiste à enfermer l'état nation donc la souveraineté populaire dans un passé confit et dangereux où le nationalisme conduisait à la catastrophe. En s'appuyant sur ce constat biaisé, les classes dominantes imposent leurs diktats aux peuples. Le contrat social est ainsi renégocié au seul bénéfice des puissants. La fin de la souveraineté populaire accompagne la mort de la démocratie.
Le texte qui suit permet de dégager quelques lignes de force concernant la légitimité et la souveraineté. Son auteur, Gilles Amiel de Ménard est membre du bureau national du M'PEP.
  
Bien cordialement.
 
Lucien PONS.

 

 

SOUVERAINETÉ, DÉMOCRATIE ET INSTITUTIONS INTERNATIONALES

Chronique de Gilles Amiel de Ménard.
Gilles Amiel de Ménard est porte-parole du M’PEP.

Le 8 février 2013.

 

 I.- Définition et conditions de possibilité de la souveraineté

On peut définir la souveraineté comme l’autorité suprême, indivisible et inaliénable détenant la puissance non limitée de faire la loi dans une communauté politique donnée. Dans une démocratie moderne, cette autorité est détenue par le peuple constitué en un corps politique, la Nation.

La souveraineté n’est pas un concept éternel, valable en tout lieu et en tout temps, indépendant de ses conditions historiques d’apparition. C’est une notion relativement récente dans l’histoire, qui date tout au plus de 8 ou 9 siècles, et reste très liée à l’apparition des États nations en Europe à la fin du Moyen Âge. Elle dépend à mon sens de trois facteurs essentiels.

 

1/ D’abord de la constitution d’une unité et d’une cohésion forte entre un territoire quelconque et une forme de pouvoir politique stable et reconnu comme légitime. Pour ce qui est de cette légitimité, apparemment simple à saisir intuitivement et presque impossible à définir rigoureusement, on se demande si les trois critères (stable, reconnu et légitime) ne sont pas en pratique légèrement synonymes : c’est une fois qu’un pouvoir a réussi à s’imposer à une population sur un territoire donné qu’il se transforme et se pérennise en une institution, qui elle-même contribue beaucoup à son acclimatation et son acceptation, la durée jouant en sa faveur, devenant donc progressivement « légitime », jusqu’à ce que des contradictions viennent perturber cet équilibre, et que de plus en plus de gens la déclarent alors « illégitime ». Comme cette notion de légitimité pose des problèmes insolubles, je propose dans ce texte de comprendre la légitimité comme la capacité sociale et implicite à faire reconnaître l’autorité d’un pouvoir institué.

Sans constitution progressive d’une cité-État athénienne, pas de démos athénien faisant la loi. Sans la lente ascension d’un pouvoir de la ville de Rome, pas de « peuple romain », de république et d’Empire romain. Sans État royal français renforcé, stabilisé et institutionnalisé, pas de souveraineté monarchique, plus tard transposable à la communauté des citoyens Français lors du passage à la république. D’une manière plus générale, l’immense majorité des « nations » s’est créée dans le long terme par les États, et non pas l’inverse.

Oublier ce facteur décisif, c’est croire que la souveraineté se décrète comme par magie, c’est être juridiciste et nominaliste, c’est-à-dire croire que le mot c’est la chose. Seul le baron de Münchhausen arrive à voler juste en tirant sur ses bottes. Une souveraineté ne se décrète pas, elle découle d’une longue maturation historique antérieure qui cristallise patiemment l’association d’un territoire, de populations vivant sur ce territoire, et des institutions représentant ce pouvoir encadrant ces populations, et ce pendant un assez long laps de temps pour lui donner une apparence d’évidence et d’acceptation générale, et surtout d’unité, de cohésion populaire qui n’apparaît évidente que par l’oubli de son origine fortuite. Cette unité est toujours le résultat d’un processus et jamais un point de départ.

 

2/ Ensuite, c’est une évidence, un degré suffisant d’autonomie de ce groupement social. Cette autonomie globale est constituée de facteurs qui déterminent une efficacité substantielle dans les domaines majeurs d’une communauté politique : justice, monnaie, impôts, budget, sécurité, indépendance militaire, alimentaire, et large autonomie économique. Ce sont des domaines évidemment complexes et relatifs, ils sont néanmoins cruciaux pour que les enjeux principaux soient maîtrisables par une autorité politique gouvernant une communauté politique sur un territoire donné. Un souverain, qu’il soit personnel ou collectif, est l’autorité permanente et de dernier ressort. S’il ne peut qu’appliquer des décisions dont il n’est pas la source, par manque d’autonomie, sa position devient formelle et se réduit à une apparence.

Deux problèmes sont à souligner dans cette perspective : celui qui tombe sous le sens, à savoir la capacité effective à ne pas dépendre de déterminations extérieures dans les domaines essentiels. Le deuxième est déjà plus subtil, et lié avec le précédent : celui de l’échelle, souvent sous-estimé. En effet, si une démocratie véritable est toujours plus difficile à instaurer dans une vaste communauté politique (problème bien connu depuis Rousseau), d’où l’acceptation d’un régime représentatif par défaut, au contraire l’autonomie nécessaire à toute souveraineté est beaucoup plus difficile à réaliser dans un petit pays, pour des raisons évidentes de poids et de puissance relatifs. Il y a donc une tension entre démocratie et grand pays, et une tension entre souveraineté, donc autonomie, et petit territoire, surtout depuis le développement des économies capitalistes et de leur niveau d’interdépendance. Il faut d’autant plus réfléchir à cette équation à trois inconnues (taille, souveraineté, démocratie), qu’il y a un lien indéfectible et essentiel entre souveraineté et démocratie, étudié plus loin.

 

3/ Il faut, en dernier lieu, insister sur le rôle essentiel des mentalités collectives pour constituer la force, la réalité, la cohésion et la pérennité de cette souveraineté. Le pouvoir de chacun est transféré partiellement à l’entité institutionnelle qui représente le pouvoir du groupe en son entier, et semble lui revenir comme une puissance extérieure. Seule la conscience, même très implicite, que cette apparente extériorité provient d’une délégation tacite, et qu’il vaut mieux obéir au pouvoir de la collectivité à laquelle on appartient plutôt qu’à la loi du plus fort, permet le maintien de la cohésion d’une communauté politique. Quand les tensions sont plus fortes que ce sentiment d’unité, alors c’est le moment d’un changement de la nature ou du périmètre d’une souveraineté donnée.

Donc poids décisif de l’histoire et de l’ État, nécessité de réunir les conditions d’une autonomie partielle et unité sociologique des mentalités collectives, tels sont les soubassements réels de toute souveraineté politique.

A partir de là, plusieurs problèmes se posent en rapport avec cette souveraineté posée dans sa définition et ses conditions de possibilité.

 II.- Institutions et souveraineté : les institutions ne vivent pas dans l’éther juridique…

Tout d’abord, il faut rappeler que toute institution s’adosse à une souveraineté, c’est-à-dire à la fois à la source d’une « légitimité » plus grande qu’elle-même, et à une capacité de contrainte, elle-même proportionnelle à la puissance de la souveraineté sur laquelle elle s’appuie. Il n’y a d’institution que là où des rapports de force se voient intermédiés par une structure sociale stable, elle-même légitimée par la puissance et la légitimité de la souveraineté à l’intérieur de laquelle elle se déploie, seule à même de faire plier les forces en question. Cela peut paraître un peu abstrait et formel, mais pourtant est très concret et décisif : en dernière analyse, les structures sociales stables, les institutions donc, ne sont reconnues comme telles et ne sont efficaces, produisant ainsi des effets concrets et prévisibles, que parce leur légitimité est reconnue, et que les contrevenants à ses décisions se voient soumis à l’autorité de la souveraineté à l’intérieur de laquelle elles prennent place. Toute institution est dépendante d’une institution de « dernière instance », qui assure la contrainte implicite ou explicite de toutes les autres et leur unité. Cette institution de dernière instance, c’est précisément la souveraineté, assurant la cohésion et l’efficacité d’un corps social. C’est parce que chacun sent confusément que la puissance souveraine provient de l’agrégation de la puissance de tous les individus qui la composent, qu’il accepte les lois et règles contraignantes régissant collectivement le corps politique auquel il appartient. Seul un formalisme abstrait et juridiciste peut croire à une institution « hors-sol », « universelle », hors souveraineté concrète qui l’englobe et l’assoit, et hors d’une communauté politique, sociale et historique déjà constituée.

 III.- Les institutions internationales : une réalité ambigüe

Tout le monde l’aura remarqué, nous ne vivons pas dans un monde unifié et indistinct, pour quelques éternités encore. Et il n’existe pas de souveraineté mondiale, exprimant le pouvoir d’un peuple mondial. On peut d’ailleurs s’en féliciter. Nos grands États nations sont déjà d’une échelle qui rend problématique l’effectuation d’un processus démocratique, on n’ose imaginer les chances qu’un tel État monstrueux permette la moindre possibilité d’une démocratie mondiale.

On peut donc dès lors s’interroger sur la réalité et la légitimité des « institutions internationales », ainsi que sur l’étrange notion de « droit international », lorsqu’on se met à l’hypostasier, à en faire une réalité institutionnelle autonome. Dans les faits, on ne peut que constater que les dites institutions et le dit droit international est bien celui qui s’exerce au nom de la puissance internationale dominante, au prorata de sa capacité de contrainte. Pour paraphraser Marx, l’idéologie dominante du droit international est l’idéologie du pays dominant, et plus simplement, le droit international efficace est le droit du pays dominant les relations internationales. La sphère de contrainte de ces institutions est celle du pays le plus puissant du moment. Et la nature de ses productions institutionnelles reflètera toujours plus ou moins les intérêts de la puissance seule à même de faire respecter ses décisions… Car telles étaient les institutions jusqu’alors, et telles elles restent, quoiqu’en aient les utopistes iréniques et naïfs du droit international et autres « droit d’ingérence ». Il n’y a pas de droit international, il n’y a pas d’institutions internationales à proprement parler. Ces dernières ne sont que des institutions nationales déguisées, protubérances anonymes et hypocrites des souverainetés dominantes dans le monde.

Pour être plus rigoureux, il existe bien une forme de droit international, c’est celui des traités internationaux, qui règlent les rapports entre les États nations sur des questions particulières qui sont au croisement de la puissance concrète de plusieurs souverainetés : des rapports économiques, des zones géographiques, des accords de guerre ou de paix, ne peuvent concrètement être régis, toujours temporairement, que par des traités internationaux qui engagent des souverainetés particulières. Mais un traité n’est pas une institution, ni un droit, c’est le croisement de deux ou plusieurs puissances, institutions, droits. L’accord éventuel qui en découle est en strict rapport avec l’équilibre temporaire des puissances en jeu, c’en est la traduction « légale ». Et il n’est légitime que parce que les puissances signataires sont elles-mêmes légitimes. Il traduit l’état temporaire d’un rapport de force ou d’une coopération dans le meilleur des cas, la distinction étant délicate. Il n’y a donc pas de légitimité en suspens, comme au-dessus, en surplomb, qui pourrait donner à cet accord comme un surcroît « divin » de légitimité, une sorte de droit universel sans communauté politique constituée et définie assise sur une souveraineté et une contrainte magiquement en dehors des communautés politiques réellement existantes. Ce fantôme déiste, c’est le « droit international » hypostasié, sorte d’oxymore très à la mode depuis que l’on conteste les souverainetés nationales.

 IV.- Les institutions internationales et la démocratie ne font pas bon ménage ! Le gouvernement par traités, une innovation anti démocratique. L’ Union européenne

Or il est désormais patent pour tout le monde que le « gouvernement par traités » est devenu lui-même une mode déferlante. Il pose clairement problème. Tant qu’il était strictement circonscrit à des questions de réglage technique entre deux nations souveraines, il ne concernait que les marges, fut-elles importantes. Mais depuis l’entrée en vigueur du cycle de mondialisation commerciale et financière, ainsi que des traités de la CEE puis de l’UE, c’est désormais l’écrasante majorité des lois occidentales qui émanent de traités internationaux ! Or cela pose des problèmes évidents de légitimité et de démocratie. D’abord, puisque tout traité international s’impose aux communautés politiques signataires une fois ratifié, sur les sujets concernés, désormais et tant que le traité ne sera pas dénoncé ou modifié, les décisions seront réputées avoir été prises comme par le corps souverain de chaque communauté. Or il n’en est rien, elles seront le fruit de négociations rarement publiques, et n’émaneront pas d’un débat parlementaire correspondant en amont, avec la publicité liée à ce modus operandi, et la réversibilité facile liée à la vie démocratique traditionnelle qui voit fréquemment une loi transformer ou annuler une précédente. Par nécessité logique, le traité international est réputé au-dessus des droits nationaux, sinon il ne servirait à rien de le signer ! Plus il y a d’acteurs concernés dans un traité international, plus l’éventualité d’une modification devient plus théorique que pratique, et plus l’obtention d’un accord suppose des négociations discrètes, sinon secrètes. En fait la réalisation concrète des traités internationaux prouve que le procédé est parfaitement anti démocratique. Depuis la montée en charge de cette manière de produire des lois, il devient manifeste que c’est un des moyens trouvés pour contourner les contraintes démocratiques des États nations, pour contourner la notion constitutive de la modernité, celle de peuple souverain et de son droit à l’auto-détermination. Désormais, c’est la quasi intégralité du corpus législatif des États nations qui est contraint, peu ou prou, par des traités qui interdisent les procédés démocratiques classiques de production de la loi, la production de la loi étant pourtant l’acte souverain par excellence.

Si ce n’est plus le souverain classique des démocraties occidentales, le peuple, qui surplombe et influe sur la production de la loi, qui est-ce ? Et bien les puissances réelles, comme avant, mais sans le contrepoids habituel des forces sociales populaires inhérent aux formes pourtant déjà bien édulcorées de la démocratie que sont les démocraties représentatives. Donc les classes dominantes de chaque pays, les lobbies, les grandes entreprises multinationales, et d’abord celles des pays le plus puissants, les États les plus puissants eux-mêmes, et pour commencer le premier d’entre eux, les États-Unis. Le champ de forces du « droit international », c’est celui du droit du plus fort auréolé de la transcendance à bon compte de la légalité, allégé du jeu traditionnel de contrepoids des souverainetés rivales et débarrassé des rapports de force démocratiques à l’intérieur de chaque État. Les parlements se résument le plus souvent désormais à des chambres d’enregistrement de décisions prises à l’ombre de ces fameux traités. Alors qu’ils devraient être la source de l’action de leurs gouvernements, c’est désormais le contraire, les gouvernements concoctent dans le secret des négociations internationales des décisions dont ils n’auront pas à assumer devant leurs peuples et leurs représentants les conséquences. L’air de rien, c’est à une inversion démocratique totale à laquelle on assiste. Les peuples ne peuvent plus peser concrètement sur l’élaboration des lois qui les gouvernent. Ces dernières échappent à leurs parlements respectifs, et à la possibilité de revenir sur les décisions les plus contraignantes. Les gouvernements s’autonomisent totalement par rapport au souverain, le peuple, pour être de plus en plus de simples courroies de transmission des états les plus puissants et des intérêts des classes dominantes.

Voilà à quoi a aboutit la montée en puissance du réputé « droit international ». Il n’y a pas de droit sans nation souveraine. Cela n’a même pas de sens. C’est croire à l’autonomie du droit, comme certains croient à l’autonomie de l’économie. Les deux ne sont que la face particulière de la puissance d’un État donné, et ne peuvent en principe comme en fait être autre chose. Lorsque l’on croit à ces fadaises iréniques et idéologiques de la « communauté internationale », du « droit international », des « lois de l’économie », des « institutions internationales », l’on cautionne sans le savoir l’absolution à bon compte du droit du plus fort et de la force des forts en général. La puissance d’une communauté politique hors de son territoire doit être contenue par les autres, et la puissance des groupes sociaux les plus forts au sein d’une société donnée doit être contre balancée par un processus démocratique interne. Ce sont ces vérités de bon sens que tente de forclore la fiction du droit international et du gouvernement par traités. Hélas, ce procédé s’est révélé extrêmement efficace pour balayer les obstacles à la puissance des États les plus puissants et aux forces des classes dominantes.

L’ Union européenne est le symbole de ce mirage institutionnel délétère. Elle construit un ordre juridique sans s’asseoir sur une souveraineté constituée, elle fonctionne par traités internationaux, donc hors de la démocratie, elle contourne les souverainetés réellement existantes, elle annule pratiquement le rôle des parlements nationaux, donc de la démocratie. Mais la nature ayant horreur du vide, le retrait des institutions véritables, celles adossées aux vraies souverainetés, ne produit pas une absence de pouvoir mais libère au contraire les forces déjà les plus puissantes, États-Unis, Allemagne réunifiée, firmes et puissances financières multinationales, classes dominantes de chaque pays… Ceux qui pariaient naïvement et de manière à proprement parler irresponsable sur un progrès pacifique et démocratique par le processus de « construction » européenne en sont bien évidemment et sans surprise pour leurs frais.

 V.- Démocratie et souveraineté. Le M’PEP

Mais si nous voulons réagir à cette dangereuse involution, sommes-nous pour autant condamnés à un retour classique des politiques de puissance des États souverains ? Absolument pas. Mais ce ne sera pas en niant les fondamentaux de toute communauté politique et de tout processus démocratique. C’est tout l’intérêt de la notion d’équilibre des échanges extérieurs développé dans la Charte de la Havane et le développement de l’autonomie nationale par la coopération internationale exposé dans le paragraphe « autonomie » de la déclaration de Cocoyoc de 1974. On peut réguler l’affrontement des puissances souveraines à l’échelle du monde, encore faut-il commencer par ne pas les nier. On peut coopérer au lieu de se concurrencer, encore-faut-il baser cette coopération sur la reconnaissance et le renforcement des souverainetés nationales, face à leurs propres classes dominantes et aux superpuissances mondiales. La démocratie est un processus institutionnel, qui vise à renforcer les dominés d’une communauté politique. Comme toute institution, elle doit pouvoir s’adosser à une souveraineté incontestable et autonome. Sinon ce n’est plus qu’un mot creux, vide de toute réalité, quand bien même toutes les apparences seraient-elles formellement respectées, ce qui n’est d’ailleurs même plus le cas : un référendum solennel en 2005 est contredit trois ans plus tard par des élus s’émancipant très visiblement de leur fonction de représentants du peuple, un président élu en Italie est remplacé hors de toute procédure démocratique par un banquier, etc. Les oligarques sentant qu’ils ont trouvé la martingale institutionnelle pour s’émanciper de toute pression démocratique, et la crise aidant, on les sent de plus en plus pressés de montrer que la règle du jeu a changé, de montrer leur force.

Pour ce qui est du lien indéfectible entre démocratie et souveraineté, il ne semble pas inutile d’enfoncer le clou. La démocratie est l’autre nom du rapport de force entre dominés et dominants au sein d’une société donnée. Son enjeu est l’influence croisée de ces deux subdivisions sociales pour déterminer les règles contraignantes régissant cette communauté, qui vont soit renforcer, soit affaiblir les inégalités sociales et donc la position respective de chacun de ces groupes. Il faut donc que ces règles soient efficaces et non formelles ! C’est d’ailleurs le secret de l’acceptation de la loi de la majorité dans une démocratie représentative. C’est parce que l’on sait que le pouvoir se joue à ce niveau, et que l’on va pouvoir jouer dans le sens inverse lors des prochaines échéances que l’on accepte temporairement la victoire de l’adversaire. L’acceptation de sa propre défaite signe la possibilité de l’acceptation de la défaite de l’adversaire par ce dernier plus tard. Que la réalité du pouvoir reste essentiellement à l’intérieur d’une scène interne à la communauté politique est crucial pour donner un sens aux compromis inévitables dans une telle configuration. Si la réalité du pouvoir réside en dehors de cette communauté, alors l’enjeu pour la détermination de ses règles internes devient dérisoire, et seuls ceux déjà assez puissants pour pouvoir influer sur les forces extérieures peuvent alors tirer leur épingle du jeu. Ce ne sera pas difficile pour les classes dominantes, au contraire. Mais ce sera la perte de tout espoir de peser sur les contraintes sociales pour les classes dominées. Leur influence ne joue qu’à l’échelle où la communauté politique à laquelle elles appartiennent dépend de son accord. Aux échelles internationales, seules les classes dominantes peuvent tirer parti de leur puissance et de leurs réseaux, et ce sans publicité inopportune. Et c’est bien sûr tout l’intérêt pour les classes dominantes de se débarrasser des processus démocratiques nationaux, où elles sont beaucoup plus contraintes et exposées.
Tant que les syndicats et les partis censés représenter les classes populaires continueront à éviter l’échelle nationale par idéologie iréniste et irréaliste, ils seront les alliés objectifs des classes dominantes qui savent que sur le terrain supranational, ils seront les éternels vainqueurs, par construction. Ceux qui ont compris qu’il fallait revenir au simple bon sens pour la survie de la démocratie, et donc sortir des traités internationaux, et pour commencer de l’OTAN, de l’UE et de l’euro, sans pour autant prôner une politique autarcique ou belliciste, sont les seuls à proposer aux classes populaires une voie réaliste pour sortir d’une défaite programmée pluri décennale entièrement liée à l’affaiblissement concerté des souverainetés nationales et donc des processus démocratiques qui leur sont indéfectiblement liés.

C’est tout l’intérêt du M’PEP dans le paysage politique.


http://www.m-pep.org/spip.php?article3196

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