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Avec ce nouveau billet [qui, je vous préviens, est un peu long], j’explique d’abord, dans une première partie, pourquoi j’ai rompu les rangs avec La France insoumise et avec Jean-Luc Melenchon. Puis, dans une seconde partie, je me projette à demain en évaluant ce qu’il est possible de faire dès maintenant.
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I – Histoire d’une rupture
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J’ai donc rompu les liens avec ce qui était, depuis deux ans, ma famille politique, La France insoumise que j’avais rejoint dès l’annonce publique de son avènement. Je l’ai fait alors que j’avais également rompu les liens, courant 2015, avec le Parti de Gauche que j’avais rejoint fin 2009. Au Parti de Gauche, je fus d’abord simple militant, puis on m’a entraîné à devenir co-secrétaire du comité d’une des plus grandes villes de France, dans une “terre de mission” selon les mots de Jean-Luc Melenchon. Puis, pour des raisons de vie personnelle, j’ai dû quitter cette ville, le département et la région où je résidais, travaillais, militais et donc vivais. Ayant quitté Nice pour m’installer à Saint-Nazaire en Loire-Atlantique, je redevins simple militant avant que là encore, on vienne me proposer de devenir délégué au Conseil national. Il n’avait jamais été dans mon intention d’être autre chose que simple militant mais les amicales et insistantes suggestions pour que je devienne co-secrétaire de comité m’avaient finalement conduit à accepter cette responsabilité partagée avec d’autres. J’en fus fier et j’ai tenté de faire de mon mieux. *
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Quelques semaines ou quelques mois après mon arrivée en Loire-Atlantique, on me demanda donc cette fois d’être candidat au Conseil National et après avoir longtemps hésité, pour des tas de raisons, j’ai accepté de servir la cause commune en représentant, avec d’autres, mes camarades en cette instance du Parti. Je n’y suis resté que quelques mois d’abord en tant que suppléant puis en tant que titulaire. Je me suis expliqué à ce sujet quand j’ai démissionné de cette fonction. Je ne quittais pas le PG à ce moment-là (janvier 2015) mais seulement ma fonction. Je pensais que nous pourrions faire évoluer les choses dans le bon sens à l’occasion du congrès prévu pour l’été. J’ai vu ! J’ai alors quitté le Parti de Gauche et je m’en suis expliqué.
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Après cela, et comme je n’avais pas été le seul, loin s’en faut, à vivre les mêmes déceptions, nous avons poussé fort pour que Mélenchon s’émancipe lui-même du Parti et invente autre chose, plus large, plus rassembleur, plus respectueux des principes démocratiques !
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L’année suivante, Mélenchon a créé la France insoumise et nous avons cru que nous avions été entendus. Nous avons rejoint en grand nombre, et immédiatement, cette nouvelle force. Mais j’ai compris le jour même, suite à un échange direct au téléphone avec Mathilde Panot que la FI ne reposerait pas sur des bases réellement démocratiques. Je ne vais pas expliquer ici pourquoi mais ce qu’elle m’a dit était très significatif de la chose !
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J’ai quand même décidé d’agir en son sein parce qu’alors Mélenchon avait adopté un discours qui me faisait espérer qu’il avait compris et qu’il allait emmener le train là où il fallait.
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Nous avons pensé que cela était vrai, jusqu’à ce qu’il commence à nous faire douter, dès le second tour de la présidentielle, avec ce scrutin interne demandant aux Insoumis de choisir la meilleure voie à suivre. Ce fut une véritable arnaque en plus de faire passer un message assez maladroit !
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Puis vint le temps des Législatives. Eu égard à ce que Mélenchon avait dit au soir du 1er tour, nous n’étions pas du tout certains qu’il mènerait le combat pour ces Législatives ni qu’il serait lui-même candidat. Là encore, avec des ami-e-s Insoumis-e-s, nous avons poussé pour que non seulement il porte le combat mais pour qu’il soit candidat lui-même. Étant donné ce qu’il a choisi de faire, nous avons pensé, une fois de plus, que nous avions été entendus.
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Mais très vite, les choses se sont gâtées. Parce que Mélenchon et ses députés se sont affrontés alors au mur de la République en Marche. Qui n’acceptait rien de leurs amendements. Qui les maltraitait. Qui les humiliait. Il aurait fallu alors en tirer les conséquences et faire un coup politique comme une démission collective de tous les députés France Insoumise ou au minimum de quelques-uns pour marquer le coup et parmi eux Mélenchon aurait dû en être ! Avec explications et pédagogie à l’appui de cette démission !
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Or rien de cela ! Lui et ses députés ont joué le jeu pipé. Et ils s’usent, et s’épuisent en vain à l’Assemblée. Ils n’y ont aucune espèce d’influence. Ils n’ont donc plus rien à y faire ! Sauf à en laisser deux ou trois pour que nous restions informés de ce qui se fait.
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Mais si je conteste leur choix de jouer le jeu, ce n’est pas cette divergence qui m’a conduit à rompre et à dénoncer vertement certaines choses.
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Non, ce qui a entraîné la rupture et la sévérité des mots que j’ai employés depuis quelques jours, c’est le fait d’avoir été trompé. Oui, je reconnais que le serment de la porte de Versailles en avril 2012, et certaines paroles ou certains écrits de Mélenchon depuis, avaient une certaine autorité dans mon esprit, au sens où je les prenais pour des propos sincères. Notamment quand il nous affirmait que jamais plus il ne jouerait à ces jeux politiciens qui conduisent à tenter de rallier à nous quelques politiciens en mal de notoriété et de reconnaissance. Tout au long de la campagne électorale pour la présidentielle de 2017 (qu’il a entamée plus d’un an avant le 1er tour), il a eu un discours sévère contre le PS et s’est tourné vers les Français, rejetant clairement toute perspective d’alliance ou d’entente avec des leaders du PS. Beaucoup le lui reprochaient d’ailleurs mais il semblait résolu sur ce point et en retour, au sein de la FI, le nombre ne cessait de croître parmi les gens qui étaient bien fermes sur cette ligne inflexible-là ! Il faut avoir mené la campagne pour savoir que si la FI rassembla autant de gens dans le travail militant d’abord, et dans les urnes ensuite, c’est bel et bien parce que, collectivement et grâce à la densité du personnage de Mélenchon, nous avions fendu l’armure et explosé le cadre de la gauche, en étant écoutés par beaucoup d’autres que nos alliés habituels.
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C’est cette route-là, celle du succès presque atteint, qu’il nous fallait suivre, en allant encore à la rencontre des Français ordinaires, et en délaissant à jamais les combines politiciennes. Or on fait clairement marche arrière depuis quelques mois. Sur la stratégie comme sur le fond du projet. Il n’y a guère que les Insoumis ordinaires pour en parler encore de ce projet-là !
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Et si des gens comme François Cocq le dénoncent, c‘est bien que c’est un fait avéré. Alors certes lui le fait en termes bien plus diplomatiques que moi mais lui, contrairement à moi, n’est pas un militant ordinaire. Je peux me permettre de dire des choses que lui ne peut pas dire, ou ne veut pas dire, pour ne pas insulter l’avenir comme on dit… Moi, je n’ai plus d’avenir dans la FI donc je suis libre de parler avec les mots que je choisis !
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J’ai donc quitté ma famille pour une série de raisons solides qui ne se réduisent ni à un amour d’adolescente déçue comme le disent certains abrutis, ni à une petite indisposition passagère qui aurait pris le pas dans mon esprit sur l’essentiel, comme le disent d’autres personnes. C’est bien une succession de problèmes majeurs qui m’a conduit à la rupture:
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– le problème MAJEUR de la démocratie qui est chantée sur tous les tons à la FI comme hier au PG mais dont on ne voit jamais le moindre début de commencement de mise en oeuvre !
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– le problème MAJEUR de l’irrésolution ou du refus obstiné de Mélenchon et de ses ami-e-s d’assumer le combat frontal contre l’UE, bras armé en Europe du capitalisme ! Mélenchon refuse d’écouter Lordon et Sapir. Il ne tient aucun compte des conseils de gens que la Frane insoumise a pourtant auditionnés lors de la phase préparatoire du projet. Je pense en particulier à Coralie Delaume et à Aurélien Bernier.
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– le problème MAJEUR de l’incapacité ou plutôt, là encore, du refus obstiné, tout à fait conscient, volontaire et assumé justement – de reprendre à son compte des propositions vraiment radicales pour abattre le modèle capitaliste. Je suis navré de vous le dire, cela va heurter bien des oreilles pucelles, mais même l’UPR va plus loin que nous dans son projet sur la mise en laisse du capitalisme ! Notamment avec l’engagement de renationaliser toute une série d’organismes et d’entreprises. Nous sommes très (trop) timides sur la question de la gratuité chère à Paul Ariès. Mélenchon refuse d’écouter Bernard Friot qui pourtant, lui aussi, avait été auditionné par les instances de la France insoumise.
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Voilà trois problèmes majeurs qui se posent aujourd’hui plus encore qu’hier ! Et sur ces trois problèmes majeurs, la réponse de Mélenchon est : il n’y a rien à discuter, aucune critique n’est légitime. Si vous n’êtes pas d’accord, au revoir !
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Eh bien, d’accord, au revoir !
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Nous allons faire autre chose, sans toi et sans ta Cour !
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Ma « famille » ne saurait être celle qu’un patriarche ou un chef de clan tient à sa botte, entouré d’une nuée de courtisans, protégé des avis contraires par toute une série de garde-chiourmes.
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Les militants ordinaires n’ont jamais pu communiquer pour de vrai avec toi. Tu n’as jamais vraiment cherché à communiquer avec nous. Nous n’avions que tes proches pour dire ce que nous avions envie de te dire. Mais nous nous doutions bien que tu n’en saurais jamais rien !
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Parfois, j’ai eu ce plaisir moi-même, tu recevais, en tout petit comité, les militants du PG qui avaient préparé la salle où tu allais délivrer ton discours mais ce genre de moment était exceptionnel et je n’y ai participé que parce que j’étais alors co-secrétaire. Les militant-e-s ordinaires ne pouvaient t’approcher. Cela aussi était un élément d’essence monarchique ! Et dans les manifestations, des ordinaires pouvaient te croiser, te serrer la main et te dire un mot ou deux si et seulement si ton service d’ordre [parfois plus que limite dans son comportement et dans ses mots] les laissaient t’approcher. Mais jamais de véritable discussion politique n’était possible. Toi tu étais au sommet et donc tu n’avais pas à causer à la masse des ordinaires, même si ces gens étaient dévoués à ton service. Tu ne causais qu’avec les tiens. Cela, je le sais, des milliers de militants en ont été meurtris. Pourtant, ils ont continué à te servir car ils croyaient qu’en te servant, ils servaient la cause commune.
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Une famille politique, ce ne peut être un collectif dans lequel le sommet est coupé et abrité des humeurs de la base comme cela a toujours été le cas au PG et à la FI.
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Ma famille politique, c’est celle qui ne se satisfait pas de ce qui est injuste, cruel, égoïste. Et c’est celle qui ne fait pas semblant de s’opposer. C’est celle qui a le courage d’affronter les débats, fussent-ils houleux ! C’est celle qui donne la parole aux gens ordinaires, pas seulement pour aller coller des affiches, mais pour décider ensemble – OUI ENSEMBLE – de ce qui touche à l’essentiel de nos vies ! C’est celle dont les leaders, nationaux ou locaux, ne se comportent pas en tyrans à l’égard des siens quand ils sont en désaccord tout en prétendant sans cesse devant l’opinion ne vouloir que la démocratie et ayant comme seul objectif de restaurer le pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple ! C’est celle qui dit ce qu’elle fait et qui fait vraiment ce qu’elle a dit ! C’est celle qui ne change pas d’avis et de stratégie comme on change de vêtements ! C’est celle qui cherche à rassembler le peuple non pas sur le « plus petit commun dénominateur » [en ne parlant qu’à de vieux débris d’un parti moribond coupable en outre – oui, très largement coupable – de la situation de malheur dans laquelle nous nous trouvons], mais qui va au devant des citoyens et qui se met en situation de mener le combat frontal plutôt que de faire feu de tout bois et de se mouler dans le système pour grappiller quelques places qui ne serviront à rien au peuple mais qui nécessitent hélas de dire et de faire des choses qui ne peuvent que dresser ce peuple contre nous !
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Les Insoumis sont tellement conditionnés, ils veulent tellement réussir, qu’ils ne tolèrent aucune critique, qu’ils repoussent toutes les suggestions venues d’ailleurs que du Numéro 1 et de celles et ceux que LUI a choisis pour mener le combat !
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Toute voix contraire est étouffée. Toute tête qui émerge est coupée. Toute action « citoyenne » qui pèserait un tant soit peu sur la décision des maîtres est immédiatement traitée comme hostile et leurs auteurs évacués du collectif ! C’était le cas hier au PG, c’est le cas aujourd’hui à la FI !
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Et c’est avec ces gens-là que l’on devrait oeuvrer ? Ce sont ces gens-là qui vont donner le pouvoir au peuple ? Vous croyez vraiment que demain, subitement, ils vont se muter en représentants n’ayant à coeur que de représenter fidèlement les volontés de ceux qui les auront fait rois ? Vous croyez vraiment que la constitution de la 6e République qu’ils disent vouloir écrire “avec” le peuple sera autre chose qu’un texte rédigé par quelques « sages » soumis ensuite au simple enregistrement des députés à la Constituante avant que le peuple ne valide par un « Oui » ou par un « Non » sans avoir jamais pu influer sur le contenu exact du texte ? Vous croyez vraiment que ces gens-là qui ne l’ont jamais accepté dans leurs familles politiques vont demain laisser au peuple la faculté d’influer sur le texte qui sera élaboré ? Il faudrait, avant de faire votre jugement sur ce point, que vous sachiez comment, au Parti de Gauche et à la France Insoumise, se prennent les décisions stratégiques…
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Oh certes « il n’y a pas de consigne » et chacun fait ce qu’il veut dans les groupes d’appui… Oui, pour autant que les groupes d’appui et ceux qui les font vivre restent bien dans le périmètre d’action étroit qui a été défini en amont pour eux… Oui, pour autant qu’ils ne cherchent pas à avoir la moindre influence sur les choses les plus fondamentales du mouvement… Oui pour autant que les Insoumis demeurent sages et dociles sinon… Eh bien ils dégagent ! Mélenchon l’a dit lui-même plusieurs fois non ? Si vous n’êtes pas d’accord: au revoir !
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On vient d’en avoir une nouvelle preuve avec l’exclusion de ces Insoumis qui ont tenté, avec un comité dédié [le CID : Comité des Insoumis Démocrates] de pousser à la démocratisation du mouvement. Je ne les ai pas rejoints moi-même et je suis donc tout à fait libre de dire que je ne suis pas surpris de leur “exclusion”. Je les avais prévenus qu’il n’y avait rien à espérer et qu’ils ne feraient pas long feu. J’ai dit, depuis des semaines, à ces Insoumis et à d’autres qui voulaient agir de l’intérieur et qui ne voulaient pas s’en aller, qu’ils seraient empêchés d’agir et évacués. Nous y sommes !
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Toutes celles, tous ceux, qui prétendent vouloir imposer de l’intérieur d’autres façons de faire ou d’autres propositions ont perdu d’avance. Car le système, même s’il n’est pas un parti, est totalement verrouillé et bien sous contrôle !
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C’est perdre son temps et son énergie que de se battre ainsi à vouloir créer des courants. Mélenchon et ses amis n’en veulent pas et ils ne laisseront personne parler librement si ces paroles ne sont pas dans la droite ligne de la doxa autorisée.
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Mélenchon a même désavoué publiquement, ces derniers jours, l’un de ses plus proches conseillers, Djordje Kuzmanovic.
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Il a manifestement écarté aussi de son premier cercle de courtisans François Cocq et Liêm Hoang Ngoc. Jacques Généreux a disparu du paysage de la FI depuis des mois. Et beaucoup d’autres avaient déjà pris la porte ou avaient été écartés dans le passé. Deux noms me reviennent en mémoire parmi d’autres : ceux des économistes Christophe Rameaux et Guillaume Étiévant. Ils n’étaient pas assez “conformes” et dociles !
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Ainsi le Roi punit, le Roi signe des lettres de cachet, le Roi disgracie, et, d’un autre côté, le Roi convie à sa cour de nouvelles duchesses, de nouveaux ducs qui sont « de bonne société » et qui sauront ne pas déplaire, ne pas avoir un mot inopportun !
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Chacun jugera de ses choix eu égard à cette situation détestable mais moi je ne peux plus avaler des couleuvres à taille de boas !
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Je ne peux plus et ne veux plus être dans le sillage d’un Tsipras ou d’un Sanders !
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Je ne veux pas tromper « les gens » en tentant de les convaincre que Mélenchon est celui qu’il nous faut à la tête de la France alors que j’ignore tout de ce qu’il ferait vraiment demain s’il était au pouvoir. Je ne veux pas tromper « les gens » en tentant de les convaincre que les cadres de la FI sont les dirigeants les plus dignes pour demain car une fois qu’ils seront devenus ministres, ou qu’ils seront aux manettes, quel moyen aura-t-on pour les tenir, pour les contraindre ? Aucun !
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Faire ce travail militant, je l’ai fait dix ans durant, avec dévouement. De différentes façons. Parce que j’y croyais, parce que je n’avais pas le sentiment d’être pigeonné. Maintenant que la confiance a été rompue, il est impossible qu’elle soit reconstituée par les mêmes. « On ne peut pas demander a ceux qui ont créé un problème de trouver la solution à celui-ci » nous disait EINSTEIN pour nous mettre en garde.
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On me dit que vu le paysage politique, et vu les dangers qui planent sur nous, il faut nous contenter de ce qu’on a ! Curieux argument que celui-là ! On n’est pas loin de l’enfermement dans lequel on veut nous jeter quand on nous dit : soit c’est Nous, soit ce seront les fascistes ! Bien évidemment, je comprends qu’à vouloir toujours PLUS, on n’ait jamais RIEN ! Moi-même, j’ai longtemps été partisan d’exigences “raisonnables” pour rassembler plus largement. Mais il ne s’agit ni de devenir “déraisonnable” ni d’arrondir les angles pour ratisser plus largement. Cela n’a jamais fonctionné. Et si cela a pu parfois amener des gens au pouvoir grâce à l’effet multiplicateur qu’entraînent certaines alliances, on a vu ensuite que l’exercice du pouvoir par des gens élus dans ces conditions-là a été détourné par eux alors que c’est le peuple qui les avait mis en place !
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Il ne suffit pas de proclamer haut et fort, des années durant, de telles bonnes intentions pour que cela soit une preuve de sincérité. Il faut pouvoir l’illustrer avec des actes. Or, si l’on parle des actes de Mélenchon et de ses amis, du PG et de la FI, eh bien il y a de quoi tousser, et de quoi s’inquiéter… Ce ne sont pas des paroles qu’il nous faut mais des garanties. Montesquieu disait, il y a plusieurs siècles que « tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser » et à cause de cela, il ajoutait que pour se prémunir de ce genre de dangers, il fallait que « le pouvoir arrête le pouvoir« . Dans un système organisé et donc reposant sur un cadre juridique constitutionnel ou légal, ce sont des dispositions écrites claires et sans ambiguïté qui peuvent et qui doivent être ces garde-fous. Et si on peut croire que des gens qui ont toujours respecté les principes et les modalités démocratiques le feront aussi demain, une fois placés au pouvoir, à l’inverse, quelqu’un ou un ensemble de gens qui se sont, de tout temps, arrangés avec les suffrages, qui se sont, de tout temps, dressés contre quiconque osait contester non pas leur autorité mais tel ou tel choix, ou qui osait pousser en faveur de la démocratie, ne peut demain que se comporter de même !
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Alors, bien sûr, que cette prise de conscience envers la nature profonde de Mélenchon, de ses ami-e-s et de son mouvement, soient difficiles à entendre et peut-être à admettre, je le sais. Tant d’espoirs sont nés depuis deux ans ! On est arrivé si haut et si près du but tous ensemble ! Mais aujourd’hui, un an après, on peut, je crois, constater que l’on a beaucoup régressé. Bien sûr, aucune élection ne permet d’en attester scientifiquement ! Mais cette conviction est largement partagée. Elle est le résultat des choix faits depuis un an et le résultat de l’élection européenne le dira de la manière la plus solennelle qui soit ! Ce n’est pas seulement moi, le militant ordinaire, qui le dit mais beaucoup de gens “autorisés”, beaucoup de gens “introduits”… S’il n’y avait que moi, ma parole ne pèserait rien mais il se trouve que ce que je dénonce, d’autres bien plus influents et informés que moi le dénoncent également ! Tous ces gens ne sont-ils que des frustrés déçus de ne pas avoir été promus ? Quelle indigence crasse que de répondre de tels propos en guise d’argumentaire ! Et ces gens qui élèvent des critiques sont-ils devenus subitement des ennemis ? Quel enfermement intellectuel de voir les choses à cette aune ! Quel bordel innommable dans le cerveau de ceux qui parlent ainsi !
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*Tout serait donc à reconstruire sans Mélenchon, sans la FI, voire contre eux ? Au risque garanti de saboter ce qui a déjà été accompli ?
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Évidemment que non. Ce n’est pas ainsi que je vois les choses. Mon dessein n’est pas de porter tort à Jean-Luc Melenchon ni de gêner La France insoumise. Mes objectifs sont bien plus nobles que ces minables sentiments de vengeance que beaucoup me prêtent.
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En outre, non seulement, moi-même, je l’ai assez dit et répété, je ne suis qu’un citoyen ordinaire et ma force de frappe n’est pas de nature à gêner vraiment un Mélenchon ou une France insoumise…
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Je pourrais persifler aussi en relevant que pour se saboter, lui et elle se débrouillent très bien sans moi… Cela calmera donc les ardeurs de tous ceux et de toutes celles qui perdent le contrôle de leurs écrits dès qu’ils lisent ce que je dis !
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Ce que Mélenchon a fait depuis dix ans, ce que les cadres et les militant-e-s du PG ont fait, ce que bien de nos ami-e-s extérieurs au PG et à la FI ont fait, ce que d’autres qui ne sont pas forcément de nos ami-e-s ont fait, tout cela a aidé le peuple à s’éveiller davantage. Je ne renie rien de cela.
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Donc, non, tout n’est pas perdu. Il est faux de dire que tout espoir est anéanti aujourd’hui par les inconséquences de Mélenchon !
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Tsipras, comme Sanders, comme Mélenchon, comme Podemos, comme d’autres proches de nous, ont au moins pour eux d’avoir fait grandir la conscience publique et ce travail-là n’est pas vain ! Et même s’ils étaient alors peut-être de mauvaise foi [je ne dis pas qu’ils l’ont été ou qu’ils le soient car je ne lis pas dans leurs pensées, je juge sur pièces], eh bien ils auront quand même agi pour la bonne cause jusqu’ici ! Et je leur en donne acte bien volontiers !
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Mais aujourd’hui, on ne peut pas se contenter de l’existant, et encore moins s’en satisfaire et donc on ne peut valider ce qui est amorcé.
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Il va s’agir de constituer une autre force, pas un énième parti, pas un énième mouvement sous le contrôle exclusif de quelques-uns, mais une véritable force politique populaire, massive, irrésistible, reposant sur des « statuts » qui ne fassent pas honte aux principes naturels de la démocratie et qui ne se constitue pas en collectif aux ordres de quelques-uns faisant semblant de vouloir donner le pouvoir au peuple !
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Pour ma part, depuis 10 ans, j’ai énormément appris de mon parcours politique, dès avant mon engagement au PG, pendant ces années au PG, et ensuite à la FI. Nous sommes pléthore de militant-e-s et sympathisants de partis, mouvements et associations ou collectifs informels aspirant au progrès et à la souveraineté. C’est à NOUS TOUS, par milliers, par millions, de nous organiser librement et de mettre sur pied la force qui renversera le régime et le capitalisme qui le contrôle.
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