1812 - Pour la première fois de leur brève histoire, les Etats-Unis déclarent la guerre !
1812 - Pour la première fois de leur brève histoire,
Déclarées ou pas, ils n’arrêteront plus d’en faire ! Mais celle-ci sera un échec !
Voici 200 ans, le Président Madison déclarait la guerre à la Grande-Bretagne. Il ne s’agissait évidemment pas d’envoyer une flotte à travers l’Atlantique à l’assaut des iles britanniques mais simplement de s’emparer militairement de la colonie britannique du Canada restée à l’écart de la guerre d’Indépendance.
Concrètement cette guerre très localisée qui gardera des dimensions modestes est une guerre entre les Etats-Unis et un Canada qui n’existe pas encore. Elle s’inscrit comme un écho nord-américain à la vaste et longue guerre européenne qui fait rage et s’organise autour du face à face inexpiable entre la monarchie britannique et l’empire napoléonien.
Elle ne touche que deux Etats de l’actuelle fédération canadienne et ne se déroulera du côté des Etats-Unis que sur la frange nord de la zone frontalière de ces deux Etats, mise à part une brève expédition britannique sur Washington. Elle est petite quant à l’ampleur des forces militaires mises en œuvre par les deux belligérants, et sporadique car les troupes régulières trop peu nombreuses doivent être complétées par des supplétifs divers : volontaires, paysans engagés dans des milices entre deux récoltes et tribus indiennes …
Mais ses causes ne sont nullement locales.
Le Canada n’est alors qu’une colonie britannique et depuis quelques décennies seulement puisque ce n’est qu’en 1763 que le traité de Paris a mis un terme, par l’abandon du Québec, à la colonisation française. Il ne s’étend guère que jusqu’à la limite Ouest de l’actuelle province de l’Ontario qui porte alors le nom de « Upper Canada ». Au-delà commencent les « terres inconnues ».
Les Etats-Unis qui en 1776 ont arraché leur indépendance à la couronne britannique ne sont encore qu’une fédération des 13 Etats de l’Est et sont engagés dans la conquête sanglante vers l’Ouest des terres indiennes. La tâche leur a été facilitée par l’achat à Napoléon en 1801 de la Louisiane française qui libère une très large portion du territoire et évite un conflit militaire classique avec une France qui n’en a pas à l’époque les moyens. Cette guerre, non déclarée, durera un demi-siècle. Il leur restera ensuite à s’emparer des terres coloniales espagnoles.
Au départ donc une volonté des Etats-Unis nouveaux d’ajouter un chapitre à la guerre d’Indépendance en s’emparant du Canada, de parachever en quelque sorte la guerre d’Indépendance, au moment où toutes les énergies et les moyens britanniques sont consacrés à la guerre contre la France Napoléonienne.
Bien qu’officiellement neutres les Etats-Unis soutiennent la France en guerre en lui fournissant du blé. La Grande-Bretagne qui a organisé le blocus continental entrave ce trafic. Les incidents maritimes vont donc se multiplier entre les deux pays et le ressentiment contre l’ancienne mère patrie est vif aux Etats-Unis. A Washington l’évolution des guerres en Europe est suivie avec attention. Or en 1812 les engagements politiques et maritimes de la Grande-Bretagne sont concentrés à la guerre contre l’empire napoléonien, la marine britannique est mobilisée par le blocus continental et l’armée conduite par Wellington est en Espagne pour aider la monarchie espagnole à chasser l’envahisseur. A Washington au Congrès les « faucons » - l’expression qui a fait fortune commence à être employée –pensent donc que le moment est propice pour se saisir de la colonie canadienne. Dans le vocabulaire militaire contemporain on parlerait de « fenêtre de tir ». Le 18 Juin 1812, les Etats-Unis déclarent la guerre à l’Angleterre.
Mais la population peu nombreuse et dispersée de la colonie n’est pas mobilisée contre le colonisateur, qu’elle soit anglophone comme dans la province du « Upper Canada » ou francophone dans celle du « Lower Canada ». Ces deux appellations sont d’ailleurs tellement récentes (1771) que leurs habitants dont l’unité n’est garantie que par la puissance coloniale n’ont pas pris l’habitude de s’appeler « canadiens ».
Il ne s’agit donc pas d’une guerre de décolonisation mais d’une guerre d’agression.
Bien que l’aide du Royaume soit limitée en raison de la poursuite de la guerre en Europe les maigres forces locales troupes régulières et milices vont résister à l’invasion. Mais elles vont bénéficier d’un appoint décisif : celui des tribus indiennes. Celles-ci en effet ont pu constater que les colons étasuniens ne reculeraient devant rien pour s’emparer de toutes les terres indiennes et que dans leur violence spoliatrice ils ne tiendraient aucun compte des frontières canadiennes. Conduites par TECUMSEH, chef fédérateur des tribus et stratège de très grande qualité, elles vont faire alliance avec le colonisateur britannique.
La guerre va durer deux ans. Le traité de Gand signé en 1814 confirme les frontières entre le Canada et les Etats-Unis. Elles ne seront plus jamais remises en cause. Le Canada, colonie britannique aura gagné dans cette guerre paradoxale son droit à une existence indépendante de son grand voisin envahissant.
Que le gouvernement canadien actuel du Premier Ministre Harper ait tenté d’utiliser la célébration du bicentenaire pour accroitre une popularité en baisse ne peut faire oublier le caractère extraordinaire de ce conflit. La mort au combat en 1813 de TECUMSEH a probablement privé les indiens du canada d’un leader historique et d’une place éminente dans le Canada nouveau.
Pour des détails sur cette guerre voir
http://www.medarus.org/NM/NMTextes/nm_02_03_1812-1815.htm
Les territoires en jeu
Figuration naïve de la guerre mais qui met en valeur l’intervention des indiens
Tecumseh
http://comaguer.over-blog.com
Au fil des jours et des lectures n°153
26.11.2012