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Le blog de Lucien PONS

Jérôme Cahuzac: «Je ne répondrai pas à votre question». Le 26 juin 2013 | Par Fabrice Arfi et Mathieu Magnaudeix et La rédaction de Mediapart.

4 Juillet 2013 , Rédigé par lucien-pons Publié dans #Le grand banditisme

Jérôme Cahuzac: «Je ne répondrai pas à votre question»

|  Par Fabrice Arfi et Mathieu Magnaudeix et La rédaction de Mediapart

Jérôme Cahuzac a été entendu mercredi par la commission d'enquête parlementaire chargée d’établir les éventuels dysfonctionnements de l'appareil d'Etat et du gouvernement dans l’affaire des comptes offshore de l’ancien ministre budget. L'ancien ministre s'est, sur les points clés, réfugié derrière l'enquête judiciaire en cours pour ne pas répondre.

 

Il a menti, puis il a avoué. Il est venu s’en expliquer publiquement, affronter les questions et les regards de ceux qui furent les siens. Jérôme Cahuzac était de retour, mercredi 26 juin, à l’Assemblée nationale où il a été entendu durant deux heures par la commission d’enquête chargée d’établir d’éventuels dysfonctionnements des pouvoirs publics – gouvernement compris ­– dans la gestion de l’affaire des comptes offshores de l’ancien ministre budget.

S'il est le personnage principal de l’affaire judiciaire qui porte son nom, Jérôme Cahuzac, mis en examen pour « blanchiment de fraude fiscale », n’est pas le sujet central des investigations parlementaires.

La question qui se pose depuis fin mai aux membres de la commission d’enquête, présidée par le député centriste Charles de Courson (UDI), consiste à comprendre comment le mensonge de l’ancien ministre socialiste a pu tenir aussi longtemps entre les premières révélations de Mediapart, début décembre, sur ses comptes cachés en Suisse et à Singapour, et ses spectaculaires aveux, début avril.

Jérôme Cahuzac prête serment, mercredi, devant la commission.Jérôme Cahuzac prête serment, mercredi, devant la commission.© (DR)

Cette audition n'aura eu qu'une portée limitée, l'ancien ministre ayant refusé de répondre aux principales questions encore posées par cette affaire. Pour le justifier, il s'est abrité à de multiples reprises derrière l'information judiciaire en cours pour blanchiment de fraude fiscale. Le président de la commission, Charles de Courson, s'est agacé à plusieurs reprises des silences ou refus ou esquives  de l'ancien responsable socialiste répétant en boucle «cela relève de l'information judiciaire, je réserve mes explications au juge d'instruction».

«J'ai compris que M. Cahuzac était venu avec l'intention de ne pas répondre à nos questions», a noté le député (UMP) Philippe Houillon. L'exercice a tourné à la farce quand l'ancien ministre du budget, relancé par le président de la commission, a catégoriquement refusé de reconnaître que c'était bien lui qui parlait dans le fameux enregistrement de l'année 2000. «Est-ce vous, oui ou non?». «Je n'ai pas tenu de propos sur cet enregistrement depuis le 2 avril et je ne veux pas le faire», a rétorqué l'ancien ministre.

Le détail de l'audition et nos éclairages

18h32. Fin de l'audition. L'analyse de Fabrice Arfi : 

© (DR)

 

18h29. Jérôme Cahuzac se refuse toujours à reconnaître que c'est bien sa voix sur l'enregistrement de 2000 mis en ligne le 5 juin 2012 sur Mediapart, « tant que la justice n'a pas éclairci cette affaire ». Relancé par Charles de Courson, Cahuzac répond : « la police scientifique identifie ma voix à 60%, et moi aussi ».

18h27. Jérôme Cahuzac refuse de dire quel montage il a utilisé pour camoufler ses avoirs en Suisse. Charles de Courson insiste, l'administration fiscale n'ayant pas été en mesure d'identifier le montage retenu lors de sa demande aux autorités fiscales suisses. «S'agissait-il d'un compte omnibus, d'un compte globalisé, d'un montage via un trust?», interroge le président. «Je ne vous répondrai pas», s'entête Jérôme Cahuzac.

18h26. « Cette affaire éclate au moment où cela doit faire le plus mal », indique Cahuzac, interrogé sur le fait de savoir pourquoi le scandale de son compte caché n'a pas éclaté avant les révélations de Mediapart.

18h20. Interrogé pour savoir s'il avait signé avec les éditions Robert Laffont, Jérôme Cahuzac confirme qu'il a l'intention d'écrire un ouvrage mais affirme qu'il n'a signé avec aucun éditeur. «Mais alors pourquoi avez-vous l'intention d'écrire dans un livre ce que vous refusez de dire aujourd'hui à une commission d'enquête parlementaire?», s'agace le député UMP Philippe Houillon. «Vous semblez préjugez de ce que sera ce livre», répond le ministre.

18h19. « Je n'ai dit la vérité à personne, et en particulier pas à mon avocat. J'ai menti à mes amis, à mes collaborateurs, à mes collègues », déclare Jérôme Cahuzac.

18h05. Charge de Jérôme Cahuzac contre Mediapart: il estime que ce sont les services du procureur et non pas Mediapart qui ont abouti à la manifestation de la vérité. Charles de Courson corrige en notant que c'est Mediapart, par une lettre d'Edwy Plenel au procureur de Paris, qui déclenche le cours de la justice. Mais évidemment, Cahuzac ne peut pas en dire plus…

18h02. Le député centriste Hervé Morin s'interroge: «Une telle passivité de l'Etat durant quatre mois est une sorte d'hommage à votre seule parole», avant d'interroger l'ancien ministre sur ses liens avec l'industrie pharmaceutique. Cahuzac affirme qu'en 1997, date de son élection comme député, il a cessé tout travail de conseil auprès des laboratoires: «Les derniers contrats ont été purgés en 1998 ou 1999 et ma société a été mise en sommeil».

18h00. Qu'a-t-il dit au premier ministre et au président de la République après les premières révélations de Mediapart sur son compte caché? «Je leur ai menti à tous les deux, j'ai le sentiment qu'ils ont alors pris acte de mes propos». Par la suite, précise-t-il, «je ne crois pas en avoir reparlé avec le président; avec le premier ministre, nous n'avons jamais abordé le fond de l'affaire».

17h57. Sur la vente de l'hippodrome de Compiègne et le rapport Terneyre commandé par Cahuzac à peine arrivé au ministère du budget, rapport dont les conclusions dédouane Eric Woerth: « Il m'a été suggéré de demander une étude au professeur Terneyre », présenté « par un ami très proche ». «J'ai suivi la recommandation de ce rapport».

17h53. Jérôme Cahuzac affirme qu'il possédait une très petit nombre de dossiers fiscaux individuels. « Je n'ai jamais à aucun moment pensé que connaître la situation fiscale des uns ou des autres pouvait constituer un levier. »

17h49. 

© (DR)

 

17h46. 

© (DR)

 

17h38. Jérôme Cahuzac revient sur le moment où une information judiciaire est ouverte, courant mars. Il affirme avoir tenté de joindre le premier ministre pour lui dire qu'il veut démissionner. « Il m'est arrivé de penser que les plus hautes autorités de l'État avaient été informées de la décision du procureur avant que moi-même je ne l'apprenne. » «Nous avons suivis un raisonnement similaire, jugeant que ma situation était intenable», précise-t-il.

17h37.

  • Fabrice Arfi : Contrairement à ce qu'a indiqué Jérôme Cahuzac, ce n'est pas l'ancien bâtonnier d'Agen Michel Gonelle qui a saisi le procureur de la République de Paris concernant l'emploi par le couple Cahuzac d'une employée sans papier, non déclarée et payée en espèces, dans leur clinique de chirurgie d'implants capillaires. Il s'agit du député Alain Merly. La saisie de l'autorité judiciaire, qui s'est faite sur la foi de l'article 40 du Code de procédure pénale, a eu lieu le 12 avril 2005, comme l'atteste une lettre en notre possession. Cette affaire a valu à M. Cahuzac une condamnation devant le tribunal correctionnel de Paris en novembre 2007. 

17h35. Jérôme Cahuzac est interrogé sur les fichiers HSBC, dont la branche française comptait son frère parmi les dirigeants. Il déforme à nouveau la réalité.

  • Fabrice Arfi : Contrairement à ce qu'a indiqué Jérôme Cahuzac devant les députés, son frère, Antoine Cahuzac, avait bien des responsabilités au sein de la banque HSBC au moment où éclate le scandale de la liste Falciani en 2009. En effet, Cahuzac frère a intégré le comité exécutif de la banque en 2008. 

17h26. Jérôme Cahuzac ne répond toujours pas aux questions. « Je n'ai pas reçu de relance après ne pas avoir répondu au formulaire » du fisc, « personne ne m'en a parlé. »

17h16. « Pierre Moscovici ne m'a pas informé » de la demande faite par l'administration française à son homologue helvétique.

17h10. « J'ai menti à l'Assemblée nationale parce que quelques heures avant les questions d'actualité, j'avais menti au président de la République et au premier ministre. »

17h08. Interrogé sur ce qui alimentait son compte, sur l'existence d'un ou plusieurs comptes, Jérôme Cahuzac se réfugie à nouveau derrière l'instruction judiciaire en cours : « Je ne peux aborder des faits entrant dans le périmètre de l'information judiciaire. (…) Le silence m'est imposé par la situation judiciaire. »

17h01. « Stéphane Fouks n'a joué aucun rôle dans ma communication. » Jérôme Cahuzac ment.

  • Fabrice Arfi : Contrairement à ce qu'a déclaré Jérôme Cahuzac devant les députés, le spin doctor Stéphane Fouks, patron de l'agence Euro RSCG, a bien assuré la communication de l'ancien ministre du budget. Mediapart tient à la disposition de qui le souhaite l'enregistrement d'une conversation téléphonique de 14 minutes, le 3 décembre 2012, à 20h49, entre M. Fouks et moi-même. Durant cette conversation, qui a eu lieu la veille des premières révélations de Mediapart, M. Fouks a tenté, d'une part, de nous dissuader de publier notre article et, d'autre part, de savoir ce que nous avions sous le pied pour être aussi affirmatif dans la connaissance des comptes offshore de l'ancien ministre.

16h58. Echange à fleurets mouchetés entre Cahuzac et le président de la commission d'enquête, Charles de Courson: la question de savoir quand le compte a été transféré à Singapour, ou d'UBS à la banque Reyl n'obtient pas de réponse. «Merci de votre non-réponse à ma question», note Charles de Courson après plusieurs refus de l'ancien ministre de répondre.

16h57. Sur ses déplacements en Suisse, Jérôme Cahuzac assure qu'il ne peut rien dire mais précise qu'il n'a pas été en Suisse pour préparer son arrivée à la commission des finances, en mars 2010.

16h56. Cahuzac interrogé sur ses déplacements en Suisse, «fin 2009, début 2010». Il refuse de répondre à nouveau, se retranchant derrière l'enquête judiciaire en cours.

16h54. Pouvez-vous nous dire si oui ou non vous aviez un compte chez Reyl sur la période 2006-2012 ? Cahuzac refuse de répondre. De même Jérôme Cahuzac refuse de répondre sur le transfert du compte à Singapour.

16h51. Jérôme Cahuzac est à nouveau interrogé sur le formulaire de l'administration fiscale dans lequel il devait dire s'il possédait un compte à l'étranger : pourquoi n'y a-t-il pas répondu et en a-t-il informé Pierre Moscovici? Jérôme Cahuzac indique qu'il n'en a pas informé Pierre Moscovici. Quant au fait de ne pas avoir répondu à l'administration, l'ancien ministre assure: «Je n'ai pas transgressé ce tabou, mentir à l'administration dont j'avais la charge m'a semblé impossible».

16h42. Question pour savoir se Jérôme Cahuzac connaissait avant le premier article de Mediapart l'existence du rapport de l'inspecteur des impôts Rémy Garnier. L'ancien ministre répond n'en avoir pas eu connaissance.

16h36. Seconde question sur le formulaire adressé en décembre par l'administration fiscale et qui demandait à Jérôme Cahuzac de déclarer par écrit s'il avait des avoirs sur un compte à l'étranger. Jérôme Cahuzac affirme qu'il n'a prévenu personne.

16h35. 

© (DR)

 

16h35. Première question sur la fameuse «muraille de Chine», qui organisait le déport de Jérôme Cahuzac de toutes les questions relatives à l'affaire de son compte suisse. Cette instruction a été signée le 10 décembre 2012. «Je n'ai pas eu l'initiative de cette instruction, le mérite en revient à Bruno Bézard, directeur général des finances publiques (...) Cette instruction organisat mon déport systématique de cette affaire, le ministre Pierre Moscovici en avait donc la charge».

16h32. Le rapporteur de la Commission Alain Claeys (PS) rappelle et insiste sur le fait que les travaux de la commission ne doivent pas interférer sur l'enquête judiciaire en cours.

16h31. Cahuzac se lève pour «jurer» de dire toute la vérite, rien que la vérité. Il annonce qu'il n'a pas de déclaration liminaire à faire comme le lui avait proposé le président de la commission. Le rapporteur de la commission précise à nouveau que le champ d'investigation de la commission est strictement «limité par le principe de la séparation des pouvoirs».

16h30. Charles de Courson, président de la commission d'enquête, rappelle le cadre exacte de ses recherches: d'éventuels dysfonctionnement dans l'appareil d'Etat et au gouvernement. Il précise que la ministre de la justice a écrit à la commission pour rappeler que celle-ci, au nom de la séparation des pouvoirs, ne peut se saisir d'éléments relevant de la «compétence exclusive du judiciaire».

15h45. En direct de l'Assemblée. Déjà beaucoup de journalistes attendent Jérôme Cahuzac.

© MM

 

Les clés pour suivre au mieux l'audition

Ce mercredi, dans l’enceinte d’une Assemblée qu’il a longtemps fréquentée du temps de sa splendeur, Jérôme Cahuzac est le témoin de sa propre histoire face aux mêmes députés auxquels il a avait juré, les yeux dans les yeux, le 5 décembre : « Je n’ai pas et je n’ai jamais eu un compte à l’étranger, ni maintenant, ni avant » :

© (DR)

L’ancien ministre va, cette fois, déposer sous serment, lever la main droite et jurer de dire « toute la vérité ». Mais le fera-t-il vraiment ? S’en tiendra-t-il à la version officielle selon laquelle l’affaire Cahuzac n’est que la chronique d’une faute personnelle – la sienne –, qui n’atteindra in fine ni le Parti socialiste, ni le gouvernement, ni l’Elysée ? Ou viendra-t-il avec des révélations, lui qui promet, selon France Inter, de « balancer du lourd » dans un livre-confession en cours d’écriture ?

Depuis le 21 mai, les nombreuses auditions menées par la commission d’enquête ont d’ores et déjà permis de tirer quelques lignes de force dans la compréhension du dossier, sans pour autant avoir permis de lever toutes les zones d’ombres persistantes de l’affaire :

  • Quand Bercy tente de court-cicuiter la justice
François MolinsFrançois Molins© Reuters

Le procureur de la République de Paris, François Molins, a confirmé devant les parlementaires le caractère inhabituel de l’enquête parallèle lancée, fin janvier, par Bercy. Cette enquête administrative en lien avec la Suisse, revendiquée par le ministre de l’économie Pierre Moscovici, n’a non seulement pas trouvé le compte suisse de Jérôme Cahuzac, mais, pire, en posant de mauvaises questions aux autorités helvètes, elle a permis d'affirmer qu’il n’y en avait pas.

La justice, qui n’avait pas été informée des démarches de Bercy, démontrera, elle, le contraire quelques jours plus tard, ce qui n’empêchera pas le directeur général des finances publiques, Bruno Bézard, d’affirmer devant les députés qu’il n’avait manqué ni de « courage » ni d’« audace » dans cette affaire…

  • L'esquive de L'Elysée

Comme Mediapart l’avait rapporté, l’Elysée a bien été informé, dès le 15 décembre, de l’authenticité d’un enregistrement accablant pour Jérôme Cahuzac. L’information a été livrée en personne par le premier détenteur de la bande, l’avocat et ancien bâtonnier d’Agen Michel Gonelle, qui fut dans le passé un adversaire politique de Cahuzac.

L’épisode a été raconté devant les députés à la fois par Michel Gonelle et par son interlocuteur à l’Elysée, Alain Zabulon, directeur adjoint du cabinet du président de la République. Ce dernier a confié n’avoir pas pu donner suite aux sollicitations de Michel Gonelle parce qu’il devait finir la préparation… de l’arbre de Noël de l’Elysée. M. Zabulon vient d’être nommé coordinateur national du renseignement, chargé de chapeauter depuis l’Elysée tous les services secrets français.

  • Le fisc n'a pas enquêté malgré les soupçons
© Reuters

Les auditions de la commission d’enquête ont également permis d’établir qu’à au moins deux périodes différentes, le fisc, alerté de soupçons sur un éventuel compte suisse de Jérôme Cahuzac, n’a pas lancé d’investigations dignes de ce nom.

La première fois, en 2001, après que Michel Gonelle se soit ouvert de l’enregistrement explosif qu’il détenait auprès d’un agent du fisc du Sud-Ouest, qui a immédiatement alerté les services compétents à Bordeaux. La seconde fois, en 2008, quand l’inspecteur du fisc Rémy Garnier, lui aussi destinataire d’informations sur les avoirs cachés de l’ancien ministre, a réclamé une enquête à sa hiérarchie – le ministre était alors Eric Woerth (UMP). Sa requête restera lettre morte.

En attendant l’audition de Jérôme Cahuzac, que Mediapart chroniquera en direct dès 16h30, voici une série d’articles qui retracent les principales informations qui ont fait l’affaire :

Les premières révélations

 

http://www.mediapart.fr/journal/france/250613/jerome-cahuzac-je-ne-repondrai-pas-votre-question?onglet=full

 

 

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