France / Syrie : Le bal des hypocrites, par René Naba
Mais qui bombarde Damas, la capitale où se trouve le gouvernement syrien de Bachar al-Assad ? Qui veut détruire l'Etat syrien ?
Les sanctions de Jean Christophe Cambadélis contre Gérard Bapt…..du Pipeau
Paris 26.02.15 – Le tollé suscité en France par la visite d’une délégation parlementaire française en Syrie, dont trois membres ont rencontré le président Bachar Al Assad, a constitué, -quoi que l’on dise, quoi que l’on fasse-, un camouflet majeur à la diplomatie française, jusque là maître d’œuvre de la conduite de la politique de la France à l’égard de Damas.
Les quatre parlementaires en déplacement en Syrie sont, outre Jacques Myard, Gérard Bapt, député PS de Haute-Garonne et président du groupe d’amitié France-Syrie à l’Assemblée nationale, Jean-Pierre Vial, sénateur UMP de Haute-Savoie, président du groupe d’amitié France-Syrie au Sénat, et François Zocchetto, sénateur UDI de la Mayenne, président du groupe UDI-UC, membre du groupe France-Syrie au Sénat.
La visite parlementaire française marque, en effet, la rupture du Front commun opposé jusque là par la classe politique française au président syrien. Et les menaces de sanction brandies par le premier secrétaire du parti socialiste Jean Christophe Cambadélis relève de la gesticulation destinée à masquer le revers cuisant de la diplomatie socialiste.
Le député de Toulouse n’a fait qu’accentuer le mouvement amorcé auparavant par une 0utre hiérarque socialiste, Michel Vauzelle, qui a rencontré à la mi février 2015, soit il y a moins de deux semaines, le Président de l’assemblée nationale syrienne, M. Jihad Lahham, dans le cadre de la conférence des parlements des pays méditerranéens.
Le fait que la rencontre Vauzelle-Lahham se soit déroulée à Monaco à l’abri des gros projecteurs de l’actualité et l’emballement médiatique qui s’empare de ce genre d’événements, n’enlève rien à sa réalité.
Difficile d’imaginer que la rencontre Vauzelle-Lahham se soit déroulée « à l’insu du plein gré » du Président socialiste du Conseil régional de la Région Provence Alpes Côte D’Azur (PACA) .
Gageons que l’ancien porte-parole du Président François Mitterrand ne se serait pas livré à une telle démarche sans l’aval de son ancien collègue de l’Élysée, à l’époque chargé de mission au palais présidentiel.
Comment sinon expliquer cette fermeté à l’égard du député socialiste Gérard Bapt et la mansuétude observée par Solferino à l’égard de cet autre hiérarque socialiste, Michel Vauzelle ? Pourquoi donc une dualité de comportement à l’égard des responsables socialistes selon que l’on soit dans l’œil des objectifs ou pas ?
Dans la guerre de Syrie et les revers retentissants qu’elle a subies depuis quatre ans, la déconfiture des fantoches qu’elle a promus porte parole de la révolution syrienne, la France est à la dérive.
Contrainte sous l’effet des dévastations infligées par ses alliés au patrimoine archéologique et architectural syrien, rompant avec un sommeil dogmatique de près de quatre ans, la France, puissance de siège, a toléré la tenue d’un colloque sur le patrimoine syrien à l’Unesco, en Mai 2014, à Paris, avec, fait inhabituel, la présence de deux officiels syriens, le directeur des antiquités et des musées, M. Maamoun Abdelkarim et M. Talal Maalla, conseiller au ministère syrien de la culture.
Ce colloque s’est tenu du Lundi 26 mai au mercredi 29 Mai à l’UNESCO, dans la plus grande discrétion, un comportement qui tranche avec l’habituelle tonitruance de la diplomatie française pour tout ce qui a trait à la Syrie, selon des informations concordantes recueillies auprès des milieux syriens de Paris.
Intrigant non ? Le colloque avait été annoncé par simple inscription au programme mensuel de l’organisation internationale, sans la moindre publicité, et les invitations lancées oralement, en tout cas pour les officiels syriens encore en poste à Paris.
S’agissait-il de banaliser un tel événement, alors que le patrimoine de la Syrie est l’objet de la plus vive préoccupation depuis le pillage du souk d’Alep et l’assaut de la bourgade chrétienne de Maaloula ? Ou d’une fausse pudeur inhabituelle de Paris pour masquer ce que nombre de ses affidés pourraient considérer comme un honteux rétropédalage ?
Intrigant non ? L’événement était pourtant de taille, qui pourrait constituer un timide dégel de la France à l’égard de Bachar Al-Assad, dont elle prédisait la chute tous les quinze jours et reconduit à la tête de son pays pour un nouveau mandat de sept ans … soit au-delà du mandat de François Hollande, après avoir enterré Nicolas Sarkozy. Un cauchemar absolu.
La schizophrénie comme mode de gouvernement.
La France a la gueule de Bois. Propulsé au rang peu envieux de pays le plus xénophobe d’Europe à l’occasion des élections européennes du 25 mai 2014, la diplomatie hollando fabiusienne et sa cohorte d’islamophilistes de pacotille essuie revers sur revers, dont le plus retentissant est sa dernière pantalonnade au Conseil de sécurité.
Il se dit pourtant que le Quai d’Orsay avait encouragé en sous-main les archéologues français à contribuer massivement au succès du colloque sur le patrimoine syrien. Pourquoi alors tant de discrétions ?
Comble de paradoxe : Le colloque s’est tenu au moment où Laurent Fabius interdisait aux Syriens vivant en France de voter à distance pour la présidentielle programmée dans une semaine. C’est à ne rien comprendre. Laurent Fabius, décidément, est soit complexe, soit retors. Soit paumé.
Vivement un nouveau ministre des Affaires étrangères qui se substitue au « somnolent des forums internationaux » qui mette en terme à cette politique chaotique si désastreuse pour sa diplomatie, de surcroît alliée des grandes démocraties régionales, (Arabie Saoudite, Turquie, Qatar) .
Sans ambages, bon débarras Laurent Fabius et le plus tôt serait le mieux. Le plus capé des hiérarques de gauche aura été la plus grosse déception diplomatique française de ce début du XXI me siècle.
René Naba
Illustration
Des parlementaires français en « mission personnelle » en Syrie à Damas avec Bachar al Assad. Photo prise le 25 février 2015/REUTERS/Sana
René Naba Journaliste-écrivain, ancien responsable du Monde arabo musulman au service diplomatique de l’AFP, puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, responsable de l’information, membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme et de l’Association d’amitié euro-arabe. Auteur de "L’Arabie saoudite, un royaume des ténèbres" (Golias), "Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français" (Harmattan), "Hariri, de père en fils, hommes d’affaires, premiers ministres (Harmattan), "Les révolutions arabes et la malédiction de Camp David" (Bachari), "Média et Démocratie, la captation de l’imaginaire un enjeu du XXIme siècle (Golias). |