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Le blog de Lucien PONS

Pour asservir un peuple il suffit de tuer sa mémoire.

15 Janvier 2012 , Rédigé par lucien-pons Publié dans #Ecole

 

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La mort programmée de l'Ecole de la République.

 

 

 

Depuis bien longtemps déjà la destruction programmée de l'Ecole de la République est en cours.
L'école libérale, au service exclusif des marchés, s'est imposée par tous les moyens sous ce quinquennat.
Durant l'année scolaire 2009-2010, la réforme des lycées n'a même pas fait l'objet d'une loi, pourtant elle a été massivement rejetée et contestée par les enseignants. Seulement quelques décrets d'application ont suffit à ce gouvernement pour l'imposer à la hussarde. Luc Chatel, ancien commercial de l'Oréal, actuellement ministre de l'Education Nationale  est à l'origine de cette loi. Il poursuit, en bon chargé de projet, son entreprise scélérate de destruction de cette belle institution. En général un ministre se doit de défendre son ministère et non de le vendre à la découpe. Dans le royaume du roi UBU cet acte pourrait relever de la haute trahison, mais dans le Banthoustan qu'est devenu la France, cette action est glorifiée. La seule préoccupation affichée est de réduire les coûts et de désengager la puissance publique au bénéfice du secteur marchand, tout émoustillé par les profits gigantesques qui se profilent. Dans l'article ci-dessous vous allez découvrir l'ampleur de l'attaque en mesurant les conséquences de la disparition de l'Histoire Géographie en classe de terminale S. Le programme de première doit contenir ces deux années d'enseignement. C'est pourquoi dans les nouveaux manuels quelques pages, trois je crois , sont consacrées à  l'étude des deux guerres mondiales! On voudrait effacer la mémoire que l'on ne s'y prendrait pas autrement.
 Avant de vous soumettre l'excellent texte de Jacques Sapir, je relève une citation d'un professeur de l'université de Louvain. Elle illustre très bien  les enjeux de ces actes non acceptables:
 
« si la science permet de construire des trains, seule l’histoire permet de savoir que certains vont à Auschwitz… ».
Les terminales S dispensés d'histoire mais gavés de Dukan?

Jacques Sapir. Dans Marianne2 le samedi 14 janvier.

 
Les terminales S dispensés d'histoire mais gavés de Dukan?
Nicolas Sarkozy multiplie les références historiques. Pourtant, à la rentrée prochaine, les élèves de terminale S pourront être dispensés d'histoire et de géographie. Alors que le sport n'est pas optionnel, que Dukan fait du poids des élèves une condition de réussite au bac, et que la Journée défense et citoyenneté, qui n'est autre qu'une propagande de l'armée, est obligatoire, l'histoire de la France et du monde au XXeme siècle est considérée comme secondaire. Un moyen d'effacer la colonisation, la Guerre Froide et la Veme République des esprits de demain ?
Notre président, flanqué de l’inénarrable Luc Chatel, ex-chef de produit à L’Oréal et ci-devant ministre de l’Éducation Nationale (ou de ce qu’il en reste), a ainsi décidé de commémorer le 600ème anniversaire de la naissance de Jeanne d’Arc. Ce soudain engouement pour l’histoire nous toucherait plus s’il ne venait couronner deux ans de mauvais coups ayant abouti à une dégradation sans précédent de l’enseignement de cette discipline. Car, l’histoire pour notre président n’a d’utilité qu’instrumentale. Son subit engouement pour les lois mémorielles, même mis au service d’une cause juste – la mémoire du génocide des Arméniens en 1915 – est là pour nous le prouver.

Veut-il donc que nous reprenions tous en coeur la célèbre chanson, Au Lycée Papillon, de Georgius et Juel (1) :

« Vercingétorix né sous Louis-Philippe
Battit les Chinois un soir à Ronc'vaux
C'est lui qui lança la mode des slips
Et mourut pour ça sur un échafaud… » ?
 

Un enseignement élitiste.
La réalité est tout autre. À la rentrée 2012, en effet, les élèves de terminale scientifique, qui représentent 50 % des élèves des sections générales, n’auront plus d’enseignement obligatoire d’histoire et de géographie. Je m’étais élevé en décembre 2009, dans les colonnes de Marianne, contre cette réforme, indiquant bien ses conséquences funestes. Nous savons aujourd’hui que l’option de deux heures, arrachée au ministère par l’APHG (Association française des professeurs d’histoire géographie) ne sera pas mise en place dans tous les établissements. La logique des réductions de crédits conduira à la réserver à des lycées et surtout à ceux considérés comme « d’élites ». Ainsi, par rapport aux anciens programmes, un élève de terminale scientifique n’étudiera plus l’histoire de la Vème République. S’il ne peut prendre l’option dans son lycée, il n’étudiera plus ni les évènements ayant conduit à la situation actuelle au Moyen-Orient, ni l’histoire et la géographie des Etats-Unis au XXème siècle, ni l’Asie du Sud-Est en Géographie (soit le Japon, la Chine, la Corée…)… Excusez du peu !

Vite fait, mal fait.
Mais ce n’est pas tout. Les programmes de toutes les premières des sections générales ont été bouleversés par la disparition de l’histoire et de la géographie en terminale S. On exige des professeurs et de leurs élèves de faire en une année ce qui se faisait en deux. Le résultat de cette aberration est que la chronologie disparaît, que l’on prétend enseigner la seconde guerre mondiale avant d’aborder le national-socialisme et Hitler. On va perdre l’attention des élèves dans ces programmes dits « thématiques » au moment où il est si important de les passionner pour les instruire. On oublie un peu vite que la maîtrise de la chronologie est un moment décisif dans la capacité à structurer les grands thèmes. La capacité d’un élève à se repérer dans le temps comme dans l’espace est un moment indispensable de sa formation.
 
La justification de cette mesure était supposée résider dans un souci de « rééquilibrage » entre la terminale S et les autres terminales. Bien faible prétexte en réalité ; les choix, des parents comme des élèves, ne sont nullement influencés par une telle suppression. En réalité, il faut y voir la volonté de quelques-uns de constituer une section S qui soit débarrassée de toutes scories rappelant les sciences humaines. C’est bien l’esprit critique que l’on attaque par cette réforme. La présence de l’histoire et de la géographie dans le « socle commun » en classes de premières ne saurait donc faire oublier les implications de leurs disparitions en terminale S.

Formater les esprits.
Il est important de bien mesurer les conséquences de cette suppression en terminale S et de ces mutilations en premières. L’intelligence des événements historiques du XXème siècle, qui est cruciale pour la formation des citoyens futurs, disparaît. La mémoire des crises passées, si importante pour comprendre la crise actuelle et ses possibles conséquences, sera ainsi occultée. Comment jauger les politiques de déflation aujourd’hui menées si l’on ignore les conséquences de la politique de Ramsay Mac Donald en Grande-Bretagne, de Pierre Laval en France ou du Chancelier Brüning en Allemagne de 1930 à 1932 ?

On comprend la logique de cette réforme. Elle va accentuer la tendance à former des spécialistes dont la culture générale, en particulier en histoire et en géographie, sera limitée. Nous savons d’expérience combien cette culture générale est indispensable dans la vie sociale et politique. Ces futurs citoyens, dont les connaissances en histoire et en géographie auront été ainsi limitées, seront d’autant plus susceptibles d’accepter des décisions qu’ils en ignoreront les tenants et les aboutissants. En 2009, en réponse à mon article, un collègue de l’Université de Louvain m’écrivait ainsi : « si la science permet de construire des trains, seule l’histoire permet de savoir que certains vont à Auschwitz… ».
 
Sur un mode plus léger, que l’on me permette alors de citer le dernier couplet du Lycée Papillon :

« Oui, je suis l'dernier, je pass' pour un cuistre
Mais j'm'en fous, je suis près du radiateur
E puis comm' plus tard j'veux dev'nir ministre
Moins je s'rai calé, plus j'aurais d'valeur »
 
Est-ce donc cela que veulent notre président et son ministre ? Est-ce donc cet avenir qu’ils entendent réserver à la moitié des élèves de séries générales en terminales ?

On oublie trop, en effet, que la connaissance des événements historiques passés est une base essentielle pour la compréhension des problèmes d’aujourd’hui et pour la définition des politiques qu’il faudra mettre en place demain.
 
C’est donc dans cette situation, à un moment crucial, que l’APHG organise le 28 janvier des « États Généraux de l’Histoire et de la Géographie pour refonder l’école et la citoyenneté républicaines » (2).

Cette initiative sera un point fort d’une mobilisation qui se développe déjà mais qui doit absolument se renforcer. Les enjeux ici dépassent, et de très loin, les seules deux disciplines en cause. Il convient que tous, nous exprimions à travers différentes formes d’action dans les semaines à venir notre inquiétude et notre incompréhension devant ces mesures.
 
(1) Que l’on pourra écouter dans son intégralité à l’adresse suivante : http://www.bide-et-musique.com/song/7882.html

(2) Voir sur le site de cette association : www.aphg.fr

 

http://www.marianne2.fr/Les-terminales-S-dispenses-d-histoire-mais-gaves-de-Dukan_a214384.html

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